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A titre d’observation générale, il est permis de constater toutefois que deux ou trois décisions saillantes ont été intimées par le suffrage universel à ses commettants. Il a porté ses coups les plus rudes sur les groupes qui s’étaient habitués à s’emparer de la direction politique par le système de la surenchère. Le parti radical-socialiste et le parti socialiste ont été particulièrement éprouvés. Les raisons de diverse nature qui ont déterminé les électeurs à faire des coupes sombres dans leurs rangs peuvent se résumer en une seule : la France ne veut pas de révolution ; elle se satisfait du développement normal et régulier des institutions républicaines.

La République qui a su nous assurer des alliances, du crédit, une discipline civile et militaire dans la plus grande crise qu’ait traversée notre pays, et qui, enfin, a remporté la victoire, est au-dessus de toute discussion. On ne sait plus ce que c’est que le droit divin ; on a horreur de toutes les dictatures, soit d’en haut, soit d’en bas. Les « élites » n’ont droit qu’à leur place au soleil, et à la récompense de leur travail et de leur utilité. La démocratie, pleine d’indulgence pour les faiblesses humaines, — et c’est peut-être là son faible, — la démocratie exige que les larges assises populaires se confondent avec les bases mômes de l’ordre social. Ni coup d’Etat, ni coup de force. Les fauteurs de désordre, d’où qu’ils viennent, sont avertis : ils ne passeront pas !

Ceci dit, la nouvelle Chambre va se mettre résolument au travail. Oui, tous ces nouveaux députés, jeunes et vieux, brûlent d’envie de se consacrer à la grande œuvre de rénovation et de restauration que le pays leur a confiée. J’ai suivi la préparation électorale d’assez près pour pouvoir dire que les capacités et les compétences seront en grand nombre dans la future Chambre : et les orateurs n’y manqueront pas. Je vois mes amis de la nouvelle fournée arriver à la Chambre avec de gros dossiers sous le bras. Ils ne s’attarderont pas à la buvette. Ils se presseront dans les bureaux et dans les commissions : on verra surgir des hommes à idées, des hommes à systèmes, mais aussi d’excellents esprits animés d’excellentes méthodes. Ce sont les plus sages et ceux qui ont le plus d’avenir qui feront le moins de bruit au début. J’en vois beaucoup qui sont sortis de nos grandes Ecoles et qui sont déjà des hommes distingués. Qu’ils ne cherchent pas à briller : c’est le défaut national. Mais qu’ils