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séparée. Il s’interdisait d’abandonner la partie. L’avantage en était, évidemment, primordial pour nous, qui trouvions, dans la déclaration de Londres, une garantie des plus efficaces contre l’éventualité d’un retour offensif de neutralisme sous l’influence de quelque lassitude ou de quelque mécompte : garantie, à laquelle, empressons-nous de le constater à l’honneur des Italiens, nous n’avons jamais eu besoin de recourir.

Toutefois, l’avantage était réciproque. La déclaration de Londres garantissait l’Italie contre le danger résultant de deux hypothèses, dont la première ne s’est heureusement pas produite, et dont la seconde s’est présentée.

L’exécution du programme territorial de la convention de Londres était subordonnée, en fait, à la victoire, qu’elle supposait implicitement, et même à une victoire assez complète pour rendre cette exécution matériellement possible. Il en a été ainsi ; mais il pouvait en être autrement. La Convention de Londres ne pouvait pas nous obliger, ni obliger les autres contractants, à combattre au-delà de l’extrême limite des possibilités matérielles de chacun. Il pouvait arriver que la continuation de la guerre devint absolument impossible. Dans ce cas, l’Italie se fût trouvée garantie contre la reprise par ses alliés de leur liberté de manœuvre ; elle aurait eu le bénéfice, du reste mutuel, de l’accord avec elle sur le principe et sur les conditions de la paix.

Il pouvait, encore arriver et il est arrivé que l’Autriche-Hongrie fit à l’un ou l’autre des Alliés des ouvertures de paix séparée ; autrement dit, qu’elle manifestât la velléité, sincère ou non, d’abandonner la cause de l’Allemagne. Dans cette hypothèse, qui s’est présentée, le gouvernement italien a eu la garantie qu’il ne serait pas répondu sans son approbation à des ouvertures de paix autrichiennes, bref, qu’il aurait le dernier mot, quitte à s’en tenir au programme de la Convention de Londres ou à en rabattre. Le bénéfice de cette garantie a été acquis à l’Italie, quand l’Autriche a pratiqué sur la France et sur l’Angleterre ses sondages pacifiques, d’ailleurs illusoires. La chronique a enregistré, en leur temps, les lettres fameuses de l’empereur Chai les à son beau-frère, le prince Sixte de Bourbon, communiquées par ce dernier à M. Poincaré et à M. Ribot ; les entretiens du général Smuts en Suisse avec le comte Mensdorff ; les conversations du comte Armand avec le