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La situation respective des deux adversaires y a changé souvent et sensiblement. Coup sur coup ont succédé : à une première année de campagne, mélangée de déceptions et de succès, mais du moins accomplie tout entière en avant des frontières, les jours très critiques de l’offensive autrichienne du Trentin ; à cette épreuve, dont les conséquences locales, un instant très menaçantes, n’ont été enrayées qu’à grand’peine, l’avance victorieuse sur la ligne de l’Isonzo, le passage de cette rivière, la conquête du Sabotino, de Podgora et de San Michèle, la prise de Gorizia ; aux offensives réitérées qui se sont ensuite développées sur le Carso et le long de l’Isonzo, le désastre de Caporetto et la retraite qui s’en est suivie jusqu’à la Piave ; à Caporetto, les contre-offensives locales couronnées de succès sur le Grappa et le Tomba, puis une victoire défensive sur toute la ligne de la Piave ; à cette victoire d’arrêt, l’offensive finale italienne, à laquelle a été donné le nom de Vittorio-Veneto, qui a conduit l’Italie à l’armistice de Villa Giusti et à la possession de tous ses buis de guerre, de Trente, de Trieste, de l’Istrie, d’autres dépouilles encore de l’Empire austro-hongrois désagrégé.

Au cours des opérations caractérisées, pendant les quarante et un mois sur lesquels elles se sont étendues, par ces fortes oscillations de fortune, nombreuses ont été les occasions où la situation précaire d’autres fronts alliés a rendu la fonction du front italien particulièrement utile. On en a déjà vu un exemple, à peine ce dernier front venait-il d’être créé, dans la diversion s’ensuivant immédiatement au bénéfice des armées russes en retraite, par suite à notre profit indirect. Un autre exemple en est fourni par les événements balkaniques de l’automne de 1915 et de l’hiver 1915-1916, l’intervention de la Bulgarie, l’invasion de la Serbie, le rejet de l’armée serbe vers la mer, à travers les montagnes d’Albanie, l’occupation du Monténégro. Il est certain que, si, à ce moment critique, le front italien n’avait pas retenu une importante partie des forces austro-hongroises, les conditions de l’armée serbe, le sort des divisions franco-anglaises portées à son secours en Macédoine, leur belle retraite du Vardar, la sécurité de la Base et du Camp retranché de Salonique s’en seraient fâcheusement ressentis. Sans doute, dans ces circonstances, l’activité du front italien n’a-t-elle pas été telle que l’Autriche, aux prises avec