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II. — IMMEUBLES BATIS ET NON BATIS.

Habitations. — Dans certaines régions, on parcourt de longs trajets sans rencontrer une maison debout ou intacte ! Il en est ainsi entre Soissons et Saint-Quentin (60 kilomètres) ; entre Soissons et Laon (38 kilomètres) ; entre Armentières et Péronne en passant par la Bassée, Lens, Arras et Bapaume (95 kilomètres). De nombreuses villes, Bapaume, la Bassée, Montdidier, Lens, Saint-Quentin, Soissons, Reims, Arras, Armentières, Bailleul, Merville, Chauny, Verdun, n’existent plus. Le coefficient de destruction, dans de nombreux cantons, est terrifiant. Dans celui de Ribécourt (Oise) qui compte 18 communes, la proportion des maisons ruinées est de cent pour cent dans 8 communes, de 80 à 95 pour cent dans 7 communes ; dans 3 seulement, il descend au-dessous de 80. La proportion est la même pour les bâtiments d’exploitation. Toutes les églises, toutes les écoles sont atteintes, la moitié irréparables. Dans l’ensemble, on estime que le nombre des immeubles détruits ou gravement endommagés est de 410 000, dont 240 000 totalement et 170 000 partiellement détruits. Il y a plus d’un an, en janvier 1919, M. Louis Dubois estimait à 22 milliards le coût des réparations et des reconstructions. Les prix ont monté depuis lors dans la proportion que l’on sait, et ce chiffre est très inférieur à la réalité. Quant au mobilier enlevé, endommagé ou détruit, on ne saurait le compter à moins de 10 milliards : car, d’après une enquête portant sur plus de 100 000 polices d’assurance, il représentait plus de la moitié de la valeur des immeubles.

Agriculture. — La plupart des régions envahies figuraient parmi les plus fertiles de la France. D’après un calcul, fait par le ministre de l’Agriculture en mars 1917, elles fournissaient, avant 1914, le quart de nos betteraves industrielles, le dixième de l’avoine, le onzième du blé, le onzième des betteraves fourragères. Le Nord et le Pas-de-Calais produisaient les deux tiers du houblon récolté en France (20 000 quintaux sur 30 000). Depuis lors, la zone dévastée s’est considérablement étendue ; les proportions que nous venons d’indiquer sont donc inférieures à la réalité, comme le prouvent les chiffres, plus récents, que nous avons cités plus haut. Les dommages subis par l’agriculture sont incalculables, souvent irréparables. Ils ne résultent pas