Page:Revue des Deux Mondes - 1920 - tome 58.djvu/281

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’invasion et endiguer l’avance ennemie, en résistant sur les positions du Monte-Maggiore, du Sabotino et dj la rive droite de I’Isonzo. Il avait averti toutefois, avant même d’avoir perdu cet espoir, qu’il prenait ses dispositions pour ramener ses forces des Alpes Juliennes sur le cours du Tagliamento et ensuite, si la nécessité le lui imposait, sur celui de la Piave. Ce sacrifice, dont il laissait entrevoir l’éventualité dès le 26 au soir, lui était apparu plus nécessaire le 27. À cette date, il avait annoncé qu’il prenait son parti de replier toutes ses armées derrière le Tagliamento dans les meilleures conditions possibles. Encore ne comptait-il dès lors que sur un arrêt de courte durée derrière cette rivière et considérait-il déjà comme infiniment probable le repli derrière le Sile et la Piave. La journée du 28 l’avait confirmé dans ces dispositions. Telle est la situation et tels sont les développements qu’elle fait craindre quand, le 30 octobre, à 6 h. 30 du matin, le général Foch arrive à Trévise, où le G. Q. G. italien, ayant évacué Udine, s’est provisoirement installé.

Une demi-heure après, il est chez le général Cadorna. Il trouve en celui-ci un chef, certes, d’une dignité parfaite, mais précisément d’une dignité assez vraie pour accueillir sans aucune susceptibilité mal placée un compagnon d’armes illustre qui vient à lui. De son côté, c’est sans aucun éclat ni tapage que le général Foch vient s’acquitter d’une mission où l’intérêt français se confond avec l’intérêt italien, et dans l’accomplissement de laquelle il apporte la plus franche sollicitude.

Dans la conférence qui se tient entre eux sur l’heure, le général Cadorna confirme au général Foch les ordres de retraite qui sont en cours d’exécution, et, ne dissimulant pas qu’il a peu de confiance dans la résistance sur le Tagliamento, il se montre enclin à continuer le repli jusqu’à la Piave. Très satisfait de l’arrivée rapide des troupes françaises, il demande que notre 10e armée prépare son entrée en ligne sur la Piave, où elle tiendrait le front s’étendant de Ponte-di-Priula à Ponte-di-Vidor, et qu’elle débarque dans la région du Vicence, Citadella, Camposanpiero, Ro et Padoue, de manière à être à pied d’œuvre. Aucune objection de la part du général Foch à cette destination. Des instructions sont données par lui en conséquence au général Duchêne, qui vient, à trois heures de l’après-midi, prendre ses ordres à Trévise.