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règlements de principe, qui sont si souvent féconds en malentendus, et on a bouclé les valises, en se promettant de profiter des premiers loisirs qu’on trouverait à Spa pour achever l’œuvre commencée et# pour accorder enfin les violons des Alliés.

Nous saisissons là, une fois de plus, sur le vif, les inconvénients de ces conférences nomades où les chefs des gouvernements, délaissant les affaires intérieures de leurs pays respectifs, arrivent, en coup de vent, pour décider du sort du monde. On ne réussit pas toujours à s’y garder des improvisations et des conclusions hâtives et, parce que les journalistes sont là qui croquent le marmot et qu’il faut bien chercher à satisfaire leur curiosité, on rédige de beaux protocoles, destinés à une publicité universelle, et l’on finit par croire, de très bonne foi, que toutes les difficultés sont aplanies, lorsqu’on a enveloppé dans des phrases lénitives les blessures causées par des discussions trop fiévreuses. L’ancienne diplomatie, aujourd’hui si décriée, avait, tout de même, ses mérites et ses avantages. Elle ne mettait pas directement en présence des hommes politiques, qui joignent au légitime souci de leur renommée l’inévitable préoccupation des embarras que leur peuvent susciter leurs rivaux parlementaires. Elle réunissait des gens du métier, dont l’amour-propre était moins engagé que celui de leurs ministres et qui étaient toujours libres, pour gagner du temps, d’alléguer l’absence d’instructions ou l’insuffisance de pouvoirs. Mais, puisqu’on a décidément renoncé à des méthodes qui n’étaient pas toujours si mauvaises, il serait bon, du moins, de ne faire intervenir les chefs de gouvernement que pour donner aux diplomates et aux experts les directions générales ou pour statuer sur des conclusions mûrement étudiées. Nous ne saurions prendre trop de précautions pour éviter des froissements entre Alliés. Les Allemands comptent de plus en plus sur nos divisions. Il a suffi que, dans les polémiques récentes auxquelles a donné lieu le traité de Versailles, certaines divergences, qui s’étaient produites entre l’Angleterre et nous, eussent été révélées à la tribune française, pour que, d’un seul mouvement, toute la presse germanique de droite se tournât vers M. Fehrenbach et lui criât : « Ne cédez pas! Nous aurons raison des Alliés, si nous savons tenir bon! »

Au milieu de tous ces flottements, l’équipe des Alliés, a vite donné barres sur elle. Elle a été très fière de n’avoir pas consenti, dans la première séance, à intervertir son programme et d’avoir fait mander télégraphiquement M, Gessler, ministre de la Reichswehr,