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Page:Revue des Deux Mondes - 1920 - tome 59.djvu/318

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Ainsi les nouvelles qui nous arrivent au lendemain de la tourmente nous assurent qu’à côté de pertes heureusement inférieures à nos craintes, nos gains sont certains et étendus. Pour les dénombrer avec exactitude, il faudra du temps encore, des années peut-être ; il faudra qu’une période plus tranquille succède aux troubles qui nous agitent après le grand cataclysme. Et qui mesurera jamais l’effet des sympathies secrètes ? elles travaillent dans l’ombre et obtiennent des résultats efficaces, mais qui échappent aux dénombrements. Par exemple : ces « cercles français » qui ont surgi un peu partout en Suisse depuis 1917, pour l’étude approfondie de la langue et de la littérature françaises ; celui de la Société des commerçants, celui des Postes, celui de l’Université et du Polytechnicum à Zurich : qui traduira leur effort et leurs conquêtes par des chiffres ? — Au moins voyons-nous avec certitude se dessiner le courant favorable, et pouvons-nous saisir dès maintenant quelques précisions.


III. — la place du français dans la culture humaine


Les pays qui nous aiment et qui nous estiment, en effet, veulent désormais un enseignement du français qui soit organisé. Ils veulent commencer par le commencement, qui est l’école ; ils veulent des institutions régulières et stables, capables de transformer en habitudes les engouements passagers. Plus de caprice ni d’aventure. Sinon pour le peuple, au moins pour ceux qui recevront la formation secondaire et supérieure, la possibilité d’apprendre le français avec des garanties pour ainsi dire officielles : voilà le fait que la guerre établit ou sanctionne. Jamais, même aux plus beaux jours, un aussi grand nombre de professeurs de langue, de littérature, de civilisation françaises (les trois termes étant d’ailleurs inséparables) ne nous a été demandé. On a commencé dès la signature de l’armistice : souvent même, des membres des délégations à la Conférence de la paix ont été chargés des négociations intellectuelles, à côté des négociations diplomatiques ; et cette demande, pour nous si flatteuse, n’a pas diminué depuis lors. On nous invite à participer, dans une mesure plus large, à la culture humaine.

Un lycée français s’est ouvert à Madrid ; un autre s’ouvre à Rome, paré du nom et des souvenirs de Chateaubriand ; deux