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tain voyage, ils arrivent. On n’en voyait guère dans nos universités françaises avant 1914 ; ils allaient demander leurs diplômes étrangers aux Japonais, aux Américains, aux Anglais ; aussi bien l’anglais était-il, à peu près uniquement, la langue qui leur permettait d’entrer en communication avec le reste du monde. Et voici qu’en France, à leur appel, deux centres d’études se sont ouverts pour eux : l’un à Lyon, l’autre à Paris ; deux Universités franco-chinoises, où ils peuvent tout à la fois continuer leur formation littéraire nationale (condition essentielle à leur point de vue) et s’initier à notre langue. Une mission française part pour la Chine : puisse-t-elle organiser bientôt l’ex-école allemande de Shanghaï, dont le traité de Versailles nous a remis la propriété conjointement avec les Chinois, et que nous n’avons pas réussi encore à ouvrir ! puisse-t-elle favoriser, avec toutes les forces de la France qu’elle représente, le mouvement spontané qui amène l’Orient vers nous !


IV. — l’organisation de l’enseignement du français


À cette demande, non seulement plus ample, mais devenue régulière et stable, répond de notre part un plus juste sens des réalités, et un plus vigoureux effort d’organisation.

Même au moment des batailles, quand la plupart de nos activités étaient paralysées, nous avons pu exercer à quelque degré notre influence. Qui croirait que nos travailleurs coloniaux, chargés d’accomplir à l’arrière leur tâche ingrate et rude, eussent eu le temps d’écouter, écoliers tardifs, nos leçons de français ? L’affaire n’était pas aisée ; ces cerveaux à peine dégrossis recevaient difficilement les empreintes ; on manquait de maîtres appropriés. Pourtant nous avons réussi à improviser, au moins pour une partie d’entre eux, un enseignement ; et semblable à la plupart de nos improvisations, celle-ci ne fut point si mauvaise. D’après une enquête faite en mars 1918 par la Mission laïque, et portant sur 36 000 travailleurs indo-chinois, plus de huit cents avaient appris à lire et à écrire, et plus de quatre mille parlaient le français. Des cours faits à Paris pour les Kabyles ont aussi donné des résultats. Autant de bon grain semé pour l’avenir, dans ce présent orageux.

Nous avons accueilli les jeunes Serbes avec le respect que méritait leur malheur. Tous et toutes ont vécu de notre vie sco-