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menacent notre avenir d’une nouvelle et totale ruine. Arrivons-nous du moins, à ce prix, à sauvegarder provisoirement notre hiérarchie, cette hiérarchie à laquelle nous avons tout sacrifié ? On ne peut imaginer un système où elle soit plus absolument violée, puisque, au premier mécontentement contre son évêque et pour éviter un changement, même justifié par les raisons les plus graves, le curé propriétaire, s’il n’obéit pas à sa conscience ; peut se déclarer le maître de son église et de son presbytère, en interdire l’entrée à son évêque et à celui qu’il lui aura donné pour successeur. C’est l’histoire de Saint-Georges de Lyon et déjà de plusieurs autres paroisses. Cette propriété personnelle, en effet, n’offre à l’autorité épiscopale contre la révolte et l’usurpation, aucun refuge, elle ne le trouve que dans l’article IV de la loi de 1905, interprété et appliqué dans ce sens par le Conseil d’Etat et la Cour de Cassation.

C’est sans doute pour cette raison qu’en plusieurs diocèses, tout au moins en quelques paroisses, au terrain de la propriété personnelle on a préféré celui des Sociétés immobilières. Ce ne peut être en tout cas qu’une exception, car pour constituer ces sociétés, il faut trouver des actionnaires qui engagent vraiment leurs capitaux. Or, en dehors des grands centres, ces actionnaires ne se rencontrent pas ou ne se présentent que trop peu nombreux. Sans doute il n’est pas défendu à des sociétés immobilières qui se sont constituées pour gagner de l’argent, de posséder des biens d’église qu’elles feraient servir à la réalisation de ce bénéfice, mais cette hypothèse ne se réalise guère.

Par essence, les biens d’église, consacrés au culte, sont hors du commerce. Il ne faut pas oublier que l’article 17 de la loi de 1901 sur les Associations interdit formellement la création d’organismes tels que les sociétés qui, sous un déguisement quelconque, tâcheraient de dissimuler l’association religieuse. Outre les sanctions, la loi édicté la dissolution et la liquidation à la requête du parquet et des poursuites contre le Conseil d’administration. D’ailleurs, en échange de ces inconvénients et de ces périls, pas plus que le terrain de la propriété personnelle, celui des Sociétés immobilières n’offre à notre hiérarchie, qu’il s’agit de sauvegarder, ne l’oublions pas, le moindre refuge. L’un de nos évêques, que nous interrogions à cet égard, nous disait : « Le curé de l’une des principales paroisses de mon diocèse, dont les biens ecclésiastiques sont considérables, dans le