cessaires pour que ce travail aboutisse à des résultats positifs. Il n’y a pas une minute à perdre. « Dans les grandes affaires, dit La Rochefoucauld, on doit moins s’appliquer à faire naître des occasions qu’à profiter de celles qui se présentent. »
Le traité de Versailles, plus encore, s’il est possible, que le traité de Saint-Germain, exige et suppose la permanence de l’intimité des Alliés. « Il est plus lourd de promesses que de réalités, » a déclaré M. Millerand, lorsqu’il était encore Président du Conseil et ministre des Affaires étrangères. Observation très juste, si juste même qu’elle peut s’appliquer à tous les traités. Il n’y en a pas un seul qui ne soit une plante délicate, exposée à se flétrir avant de porter des fruits, si elle n’est pas soigneusement cultivée par ceux qui l’ont semée. Sans songer à me donner pour prophète, j’avais moi-même annoncé, l’an dernier, que la paix serait « une création continue. » Je n’ai jamais passé pour un admirateur aveugle du traité de Versailles ; j’en ai plus que personne regretté les insuffisances. Mais, s’il n’a pas rempli les espérances de tous les Français, il nous a, du moins, garanti un minimum de satisfactions dont nous avions le droit incontestable de ne rien céder. Le traité est signé depuis le 28 juin 1919 ; il est ratifié ; il est théoriquement mis en vigueur depuis le 10 janvier 1920 ; les clauses essentielles en demeurent cependant inappliquées ; et l’Allemagne crie de plus en plus haut qu’elle ne les appliquera pas.
« Dans les demandes de l’Entente, écrit la Deutsche Tageszeitung, il ne s’agit nullement de réparations, mais de chantage pur et simple. Tout ce que l’Entente a pris à l’Allemagne : colonies, Alsace et Lorraine, bassin de la Sarre, flotte de guerre et de commerce, tout cela compense amplement les dommages qu’elle a subis, parce que les Poincaré ont voulu la guerre. » Voilà une perte qu’on me permettra d’enchâsser. Lorsque Guillaume II a fait, en 1917, une dernière et mélancolique visite au Haut Kœnigsbourg, il a eu l’idée singulière et maladive d’y laisser un devant de feu portant, en grands caractères métalliques, la phrase que ses remords lui ont si souvent arrachée : « Je n’ai pas voulu cela. » N’en déplaise à la Deutsche Tageszeitung, aucun Français n’a besoin de déclarer devant le monde qu’ « il n’a pas voulu cela ; » tous attendent le front haut et la conscience tranquille le jugement de l’histoire. Mais que dire des Allemands qui ont reconnu à Versailles, en termes solennels, la responsabilité de leur pays dans la guerre et qui, au lendemain du jour où cet aveu a été consigné dans un acte diplomatique, s’empressent de le rétracter ? Et