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d’un réseau d’occupations qui ne peuvent exercer que la cent-millième part de son intelligence, tandis que le reste est oisif.


12 décembre, minuit.

J’ai lu en voiture Goetz de Berlichingen. — J’aime la scène du moine au premier acte. Ce jeune homme qui s’ennuie du couvent et envie l’armure du chevalier est assez primitif. — Il est beau, ce Goetz qui suit pas à pas le parjure, dans les forêts, comme un Dieu vengeur. — Mendo le bourreau.


19 décembre.

Il y a en Devonshire une ville nommée Penzance (Cornwall), port de mer italien pour la chaleur du climat. — J’irai vivre là plutôt que dans une petite ville ou grande ville de province en France.


19 décembre.

Habiles à détruire et inhabiles à fonder, voici les libéraux épouvantés de leur triomphe ; Valentin de La Pelouze, chef du Courrier français et d’un bataillon de ma Légion, m’a confié ce matin les mêmes tristesses que Benjamin Constant avait livrées à la tribune. À travers ses confidences perçait le désir d’être au ministère : « J’ai été vingt-deux ans chef de division aux Finances. — J’aimerais assez VILLELE aux Finances ; c’est un homme d’affaires sans conviction. »

Il disait du mal du petit Thiers ; le parti vainqueur s’épure comme les royalistes en 1815. — Il a signé les ordonnances et a disparu, disait-il. — C’est du reste un homme qui a beaucoup d’aplomb et de jugement. — Il ne sait plus où trouver des hommes d’État.

Les tumultes populaires vont commencer. — M. de Marmier, vieux étourdi, courtisan sans cervelle, est l’homme qu’il faut pour tout perdre en compromettant la Garde Nationale. Il commencera la guerre civile, si on le laisse faire. Inconséquence des hommes, absurde charlatanisme ! Il se réjouissait hier de ce que les troupes de ligne étaient disposées à faire feu, et la cendre des soldats de la Garde est maudite par lui tous les jours.

— Je reste à Paris par honneur et pour ne pas avoir l’air de fuir un danger, et je vais voir lutter, sous le prétexte du