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20 février 1921, un Coréen assassinait à Tokyo son compatriote Min-won-sik, accusé de s’être rallié au régime japonais et convaincu d’avoir fait de la propagande publique en faveur de ceux que le parti national regarde comme des oppresseurs. La Corée est solidement occupée et ligotée, mais les Japonais ne s’y sentent pas chez eux ; ils n’ont pas gagné les cœurs et, s’ils se trouvaient engagés dans quelque guerre, leurs adversaires pourraient trouver en Corée des complicités qui, en cas de revers, deviendraient dangereuses.

L’alliance du 3 juillet 1916, entre les Russes et les Japonais, consacre et consolide l’état territorial créé par le traité de Portsmouth, établit un partage d’influence dans les régions tributaires de l’Empire chinois. C’est une sorte de condominium qui implique l’exclusion de tout autre concurrent et l’annulation de fait du régime de la porte ouverte. La Russie, même vaincue, reste une force à laquelle il faut faire sa part : le Japon compte sur le temps et sur sa puissance d’expansion pour la refouler peu à peu. Mais tout à coup la Russie s’effondre et se disloque : c’est un champ nouveau qui s’offre aux ambitions du Japon ; c’est cette Sibérie orientale, ces riches vallées de l’Amour, de l’Oussouri, de la Tchita, cette île de Sakhaline, sur lesquelles il regrette d’avoir, aux temps antérieurs à l’ère de Meiji, trop facilement laissé les Russes mettre la main. Mais la Russie, dans cet Extrême-Orient, n’est pas chez elle ; ses steppes et ses plaines s’étendent jusqu’au lac Baïkal ; au-delà commence un pays d’une tout autre nature dont les eaux vont au Pacifique et où vivent des tribus mongoles ; c’est le domaine des peuples jaunes et le Japon civilisé rêve de s’y établir, car le maître de Pékin a toujours été le peuple qui domine en Mandchourie, en Mongolie, en Sibérie orientale. Après la révolution bolchéviste, la politique du Japon apparaît clairement ? il favorise le morcellement de la Russie, l’établissement, en Sibérie orientale, de petits États dont il s’assurera le contrôle. A la fin de 1917, l’Entente demande au Japon, son allié, d’intervenir en Sibérie où plus de 200 000 prisonniers austro-allemands ont pris les armes, menacent Vladivostock, la ligne du Transsibérien et les immenses approvisionnements accumulés dans la Province Maritime ; ils font cause commune avec les bolchévistes. La France et l’Angleterre insistent pour que l’armée japonaise intervienne ; elles acceptent les conditions du Japon