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distants de trois pieds ; on les nommait lis, à cause de leur ressemblance avec le calice de ces fleurs. En avant encore, on semait de tous côtés et auprès l’un de l’autre, des pieux longs d’un pied, garnis d’un crochet de fer, entièrement enfoncés en terre ; on leur donnait le nom d’aiguillons. » Les fouilles de Stoffel ont montré la parfaite exactitude de tous ces détails. Il a retrouvé des traces et même des restes de ces diverses défenses ; il a pu suivre la ligne des fossés creusés dans un sol dur et comblés depuis par des terres de remblai ou d’alluvion, d’un aspect et d’une couleur tout différents ; il a retrouvé en place quelques-uns de ces aiguillons de fer et de ces pals de bois ; il les a rapportés au musée de Saint-Germain, où ils sont exposés ; il a fait exécuter, pour le même Musée, de petits modèles en relief, permettant de saisir sur le vif ces procédés de guerre singulièrement perfectionnés. L’image en a été reproduite souvent dans les histoires romaines ou même dans les éditions classiques des Commentaires de César.

Quant à la muraille qui formait la double ligne enveloppant la place, elle était « faite ou armée de terre, de fer, de bois et d’osier, dit M. Jullian, s’allongeant sur quatre lieues de tour, étendue sur toute la plaine, franchissant les rivières, escaladant les coteaux, suivant le rebord des plateaux, surplombant les roches escarpées, redescendant et remontant quatre fois, dominant les crêtes des monts de Bussy et de Flavigny, à cheval sur la croupe du mont Pévenel, en contre-bas du mont Réa et étreignant la montagne d’Alesia d’une ceinture continue. On avait bâti a Vercingétorix une prison digne de lui. »

Car c’était bien une prison, dont il ne devait point forcer les portes. En vain une armée de secours tenta-t-elle de le débloquer. Après plusieurs essais infructueux, qui firent couler des flots de sang gaulois et romain, voyant les vivres à peu près épuisés, le courage de ses soldats abattu, leur énergie brisée, il comprit qu’il devait renoncer à la lutte sainte et se sacrifier pour sauvegarder les siens, si le vainqueur y consentait. Il convoqua les chefs en un dernier conseil, et tous, d’un commun accord, décidèrent de capituler. César exigea une reddition avec armes et bagages. Il n’y avait plus à discuter, mais à se soumettre.

La scène, telle que nous l’ont contée les auteurs anciens autres que César lui-même, ne manque pas de grandeur. Le vainqueur prit place, en avant du camp, sans doute sur la pente