Page:Revue des Deux Mondes - 1921 - tome 6.djvu/394

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

religion exhale une moindre spiritualité. Mais ce sont en revanche, et jusqu’à nouvel ordre, des pays de moindre laïcisation.

A partir du siècle dernier, ce proche Orient européen ou asiatique a été considéré comme ouvert aux compétitions internationales, commerciales et financières. Et l’indice le plus manifeste de la place que les religions y tiennent, c’est que la politique dite « d’influence, » avant-coureuse ou régulatrice de la politique de conquête, s’est ingéniée à s’assurer des concours religieux et a même pris un peu l’habitude d’en faire le pivot de ses intrigues. C’était déjà vrai de l’Asie-Mineure, du Levant et de la péninsule balkanique, au temps où la Russie impériale faisait exception, barricadée qu’elle était derrière une religion officielle contre laquelle elle n’eût pas toléré la moindre entreprise. C’est vrai aujourd’hui, ou plutôt ce le sera demain, de la Russie elle-même, puisque la brèche ouverte par la Révolution laissera passer désormais les propagandes de l’Occident, qui d’ailleurs, sous ce rapport, et depuis le bolchévisme, a bien une revanche à prendre.

On n’est vraiment embarrassé que du choix pour établir par des exemples concrets, à quel point la question des rapports entre les deux Rites s’enchevêtre dans l’économie des affaires proprement politiques, qui pullulent au lendemain de la guerre. Jamais, par exemple, la propagande confessionnelle n’a pris de formes plus variées et plus pénétrantes dans la partie asiatique de l’ancien Empire ottoman. Le contre-coup de la chute du césaro-papisme russe s’est fait sentir, comme de juste, sur les communautés slavo-orthodoxes d’Arménie, de Syrie, de Palestine, dont la plupart ne devaient leur prospérité qu’à l’appui diplomatique et financier du régime impérial. Il semblait donc que le catholicisme dût profiter tout le premier de ce désarroi, et Rome en a certainement conçu l’espoir. Mais voici que se lèvent, animés d’une ardeur inattendue, de nouveaux compétiteurs. Passons sur le sionisme, auquel la sympathie du gouvernement de Londres peut bien assurer un foyer territorial, sans toutefois augmenter le moins du monde, bien au contraire, la puissance d’attraction de la religion judaïque. Le protestantisme anglo-saxon, en revanche, recherche activement des conversions, ou, si l’on préfère, une clientèle. Américaine, sa propagande participe sans doute de la vague de prosélytisme qui nous est venue des États-Unis depuis 1917, sans exclure