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nouveau aux sentiments haineux des ennemis de l’Entente. A Ekaterini, sur la frontière Sud de Macédoine, une troupe d’environ cinq cents vénizélistes agissant sans ordres attaquait les troupes royales stationnées à quelque distance, il y eut des morts et des blessés, et le général Sarrail, à la demande de l’amiral Dartige, dut intervenir pour rétablir l’ordre. C’était un bon prétexte fourni aux royalistes pour donner libre carrière à leurs sentiments haineux contre les vénizélistes. Ils attribuèrent aux Français ce coup de main accompli spontanément par quelques centaines de soldats indisciplinés. C’était toujours le même procédé consistant à accuser les Français de tous les malheurs du pays, et l’hostilité contre eux se manifestait de plus en plus sous toutes les formes.

Bientôt après, le général Roques, ministre de la guerre, revenant de Salonique où il s’était rendu, pour s’entretenir avec le général Sarrail et organiser une zone neutre entre les troupes royales et celles de Venizélos, s’arrêta à Athènes où l’attendait un télégramme de M. Briand l’invitant à profiter de son passage dans cette capitale pour régler « les questions pendantes. » En partant, il laissa ses instructions à l’amiral Dartige du Fournet en vue d’obtenir la cession du matériel de guerre de l’armée grecque. Les représentants des Puissances alliées se trouvèrent dès lors dessaisis de cette négociation, qui fut poursuivie directement entre l’amiral et Lambros, le président du Conseil grec.


III

Le 17 novembre, l’amiral remettait au gouvernement royal une note demandant 18 batteries de campagne, 16 batteries de montagne, 40 000 fusils, 150 mitrailleuses, le tout avec munitions et 50 camions automobiles.

« C’est la question la plus délicate, écrivait l’attaché naval, car, pour être résolue, elle suppose une participation active des Grecs. L’Etat-major et ses amis font tout leur possible pour créer l’agitation à ce sujet. Des protocoles ont circulé parmi les officiers ; les réservistes ont supplié le Roi de ne pas livrer les armes. On a fait jurer aux soldats de les détruire plutôt que de les rendre. En fait, tout cela s’est traduit jusqu’ici par des transports et des distributions de fusils, non pour s’en servir probablement, mais pour les disperser et cacher. »