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langue allemande. » Pour répondre à ce besoin, une maison mère provinciale des sœurs de Saint-Charles fut ouverte à Trêves, le 21 novembre 1849. La première supérieure en fut une Alsacienne, la mère Xavier Rudler, de Guebviller.

En attendant que cette sainte pépinière puisse fournir ses produits franco-rhénans, la bourgeoisie des villes et le petit clergé des campagnes multiplient pétitions et démarches auprès de leurs évêques, auprès des autorités prussiennes et en France, afin d’obtenir pour leurs écoles, leurs orphelinats et leurs hôpitaux, des sœurs de charité et des sœurs enseignantes françaises.

Les bourgeois d’Aix-la-Chapelle ne peuvent plus se contenter de ces institutrices du pensionnat de Saint-Léonard, qui ont pourtant si bien traduit à leurs enfants la pensée française. En 1844, ils demandent au Gouvernement l’autorisation de confier la direction de Saint-Léonard aux dames françaises du Sacré-Cœur. C’est un ordre auquel appartenaient déjà plusieurs jeunes filles de la société d’Aix. Le gouvernement prussien refuse, sous prétexte que l’introduction d’un ordre étranger risquerait de compromettre la discipline religieuse et de jeter le trouble dans le diocèse. Eh bien ! les Aixois auront tout de même des dames du Sacré-Cœur. Ils les installent sur la frontière belge, à Vaels, tout près d’Aix, et l’archevêque de Cologne, Mgr Geissel (celui-là même que nous avons vu au séminaire français de Mayence), sans souci de la censure prussienne, entretient une correspondance suivie avec leur supérieure française, Mme Dulac.

Mais je dois abréger et limiter le nombre de mes exemples. En vain les multiplierais-je, je donnerais toujours une idée incomplète de ce profond mouvement. Ces sociétés que nous énumérons, ces appels et ces démarches des bourgeois, ces confréries, ces petits cénacles, toutes ces activités que nous voyons affleurera la surface du sol, c’est le signe d’un fou intérieur, c’est l’effet d’une puissante animation souterraine, que nous retrouvons d’ailleurs dans tous les ordres de l’activité rhénane. D’année en année, l’action de la charité française, dont les germes ont été apportés par les administrateurs napoléoniens, se développe sur le Rhin. Nos ordres religieux y foisonnent. Cela déplaît aux bureaucrates prussiens, ne leur parait pas compatible avec l’unité d’action qu’ils veulent imposer à la Rhénanie. Je me