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théâtres soient sous ma coupe, comme le reste. Il me faut un critique sûr, un homme à moi, qui ne se livre jamais aux fantaisies de l’impartialité.

Vernouillet donne à Giboyer moitié des appointements de son prédécesseur et ajoute : « Je te permets de lever des impôts sur les artistes. »

La grande discussion, qui va fixer l’orientation de la Conscience publique, s’ouvre aussitôt. Dans le Conseil, toutes les opinions sont représentées : centre gauche, juste-milieu, légitimiste, socialiste, éclectique et rieniste. On le constate avec satisfaction :

GAUTEREAU. — Malgré cette variété d’opinions, il est un terrain sur lequel nous nous rencontrerons toujours, j’en suis sûr. Nous sommes tous conservateurs.
GIBOYER. — Excepté moi, qui n’ai rien à conserver.

Sergine, le personnage sympathique, celui qui, au dénouement, épousera la jeune et charmante Clémence, et dans la bouche de qui Augier n’a certainement pas placé des paroles qu’il eût blâmées, Sergine (nous sommes en 1865) réclame le suffrage universel « dont on aura fait un instrument de précision, en assurant la compétence de l’électeur et la sincérité du vote. »[1]

Il développe sa pensée, s’anime, évoque les problèmes les plus grands, et s’attire cette admirable réponse de Charrier, troublé, comme ses amis.

— Mais, mon cher, on n’a pas le droit de soulever de pareilles questions sans les résoudre !
Sergine continue :
— Le triomphe de la cause du peuple est la substitution des privilèges de l’intelligence, au privilège, de la naissance,
Tout le monde l’approuve :
D’ISIGNY. — Le droit de l’intelligence est le seul devant lequel tous les partis doivent s’incliner.
CHARRIER. — Tout ce que vous avez dit, mon cher, je m’aperçois que je l’ai toujours pensé sans m’en douter.
— C’est le salut, c’est au moins une solution.

  1. Ce sont les termes mêmes dont se servira Emile Augier dans la Question électorale.