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Belfort, Verdun, Vitry-le-François, Sézanne, Meaux, Pontoise.

En Galicie, par bonheur, le succès des Russes est éclatant. Ils sont entrés hier à Lemberg. La retraite des Austro-Hongrois a pris le caractère d’une déroute.

Depuis le 17 août, les Russes, partis de la ligne Kowel-Rowno-Proskurow, ont avancé de 200 kilomètres. Dans cette opération, ils ont capturé 70 000 hommes et 300 canons. Sur le front Lublin-Kholm, les Austro-Hongrois résistent encore.


Vendredi, 4 septembre.

La menace, qui plane sur Paris, entretient dans la société russe un courant de pessimisme qui fait presque oublier la victoire de Lemberg. On ne doute pas que les Allemands n’enlèvent de vive force le camp retranché de Paris. Après quoi, dit-on, la France sera obligée de capituler. Puis, l’Allemagne se retournera de toute sa masse contre la Russie.

D’où viennent ces rumeurs ? Par qui sont-elles propagées ?

Une conversation, que je viens d’avoir avec un de mes informateurs occultes, N…, ne m’éclaire que trop, à ce sujet. Le personnage est suspect, comme tous les gens de son métier ; mais il est bien renseigné sur ce qui se passe et se dit dans l’entourage des souverains. Puis il a, présentement, un motif spécial, tangible, de me parler avec sincérité. Après un éloge du magnifique patriotisme qui anime la France, il poursuit :

— Je suis venu chercher un peu de confiance auprès de vous, Excellence, car je ne vous cacherai pas que j’entends formuler partout les plus sinistres prophéties.

— Qu’on attende au moins le résultat de la bataille qui s’engage sur la Marne ! Et même si cette bataille n’est pas heureuse pour nous, la partie ne sera nullement désespérée…

J’appuie mon affirmation par une série de faits positifs et de prévisions raisonnables, qui ne me laissent, dis-je, aucun doute sur notre victoire finale, pour peu que nous ne manquions ni de sang-froid ni de ténacité.

— C’est vrai, reprend N…, c’est vrai. Et cela me fait grand bien de vous entendre… Mais il y a un élément dont vous ne