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Page:Revue des Deux Mondes - 1921 - tome 63.djvu/382

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Ta justice rompit les desseins du méchant,
Dieu parla par ta bouche pure,
L’homme bardé de fer dut respecter le champ,
Ta crosse eut raison de l’armure.

Aussi, ce soir, tandis que s’éteint l’angélus,
De rameaux en rameaux, son à son, feuille à feuille,
Tandis que dans l’air mou passent des vols velus,
Près de ton lit étroit, ton âme se recueille :

Ton esprit inquiet pèse tes actions,
Sur les justes plateaux de la balance intime,
Comme des diamants aux limpides rayons
Qu’un joaillier prudent avec lenteur estime.

Mais l’antique serpent qui règne dans la nuit
Fait rutiler en toi les plus riches merveilles :
De quel suprême éclat chaque pierre reluit !
La Reine de Saba n’en eut pas de pareilles.

Des perles, des béryls éblouissent tes yeux,
Unissent leurs éclairs ou mélangent leur onde ;
Un immense rubis éclate, radieux,
Comme un soleil levant jaillit d’une eau profonde.

Les paons de Salomon, dans le nocturne azur.
Tout blancs, à la clarté des étoiles premières,
Du haut du cyprès noir ou du mélèze obscur,
N’ont jamais répandu de plus vives lumières.

Ainsi l’Orgueil te lie à des mirages vains ;
Il séduit tes regards d’une ombre colorée,
Et le bien que tu fis, transformé par ses mains,
Souille, lys infernal, la mystique soirée.



Mais voici que soudain tout l’espace frémit :
Le monastère vibre ainsi qu’un luth de pierre,
La montagne s’émeut, et l’éther endormi
Se réveille au dernier appel pour la prière.