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surtout en nouvelles politiques ou de cour ; il est souvent question aussi de la Jeunesse de Goethe, opéra qu’Henri Blaze écrivit en collaboration avec Meyerbeer, à la demande de celui-ci : terminé avant la mort du musicien, il ne fut jamais joué, et est actuellement encore inédit à Berlin.

Henri Blaze se complaît à envoyer à sa femme toutes les impressions défavorables au gouvernement… « Il devait y avoir pour le mardi gras une manifestation révolutionnaire. Tout le quartier latin était convoqué par des meneurs que l’on a mis sous clef, et une affiche avait été placardée sur les murs des écoles, ainsi conçue : On demande des ouvriers, pour balayer une cour et deux chambres. » Les collèges qui devaient sortir sont consignés, ainsi que l’école de Saint-Cyr ; quant à l’école Polytechnique, le général qui la commande rassemble le matin tous les jeunes gens, et leur dit qu’il prend sur lui de les laisser sortir, mais que ceux d’entre eux qui seraient rencontrés dans des groupes, seraient irrévocablement expulsés.

« L’adresse du Sénat s’est terminée, mais non sans avoir provoqué dans l’intérieur de la famille impériale, des irritations plus graves peut-être que celles du dehors. Ainsi à l’un de ces petits dîners des Tuileries auxquels n’assistent que la famille et le service, comme le prince Napoléon tardait à venir, l’Impératrice, se levant tout à coup, dit tout haut : « Eh bien ! on dînera sans lui ; d’ailleurs il fera tout aussi bien de ne pas venir, car je lui réservais un compliment qui ne lui aurait pas été agréable. » On dîna donc, le Prince ne vint pas. Après le dîner, comme on était tout à fait entre soi, Galliffet dit au Prince Murat : « Ah ! çà, mais il se passe ici d’étranges choses, vous avez entendu tout à l’heure la sortie de Sa Majesté, et voici maintenant ce dont j’ai été témoin aujourd’hui.

« Le colonel Franconnière, aide de camp du Prince, était venu nous voir dans notre salle ; je lui ai dit, à propos du dernier discours du prince Napoléon : « Savez-vous qu’il est singulier, notre Prince, et qu’il apporte à la tribune du Sénat de drôles d’idées à propos de l’hérédité ? » (Ceci est une allusion à un passage du discours, dans lequel le Prince avait soutenu que l’Empereur ne régnait que par le suffrage universel, et que désormais il n’y aurait en France d’autres droits dynastiques que ceux-là). « Mais, répondit Franconnière, ce sont là les idées du Prince, et je crois aussi, de l’Empereur. » Et Murat, qui avait