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on retrouve de bons noms de France, et des figures sérieuses ou fines de savants français, qui nous découvrent la grande part qu’eut de 1575 à 1650 notre pays dans la prospérité et le prestige de l’Université hollandaise.

Les deux premiers professeurs nommés furent deux théologiens de chez nous, Louis Cappel, Parisien, et Guillaume Feugueray, de Rouen.

Puis à côté de Douza, Juste Lipse, Heinsius, Vossius, et de tant de Hollandais et de Belges qui illustrèrent l’Université de Leyde, vinrent s’asseoir dans les chaires magistrales des théologiens comme Lambert Daneau de Beaugency, Saravia de Hesdin, l’Artésien Trelcat, le Berrichon du Jon, Basting de Calais, le Normand Pierre Dumoulin, Polyander de Metz, André Rivet de Saint-Maixent ; des juristes comme Hugues Doneau de Chalon-sur-Saône, Dominique Le Baudier de Lille ; des logiciens comme Duban d’Autun et Jean Botté de Granville ; des professeurs d’éloquence ou de langue française, comme l’ex-jésuite, Pierre Jarrige, l’ex-comédien Antoine de La Barre, et le Lyonnais Pierre Lamôle ; enfin le fameux botaniste Charles de l’Écluse, d’Arras, et ces deux savants universels, l’incomparable Joseph-Juste Scaliger, d’Agen, et l’illustre Bourguignon Claude Saumaise. La gloire et l’influence intellectuelles de Leyde sont françaises pour une bonne part.

Ce n’était pas toujours une mince affaire que de faire venir de France un savant renommé : les traités de Westphalie et de Nimègue ne se sont pas menés à bout plus facilement que l’acquisition de Scaliger, de Rivet ou de Saumaise par l’Université de Leyde.

On expédiait au grand homme un ambassadeur chargé de traiter la négociation. Il était porteur de lettres des bourgmestres de la ville et curateurs de l’Université qui contenaient les propositions ; d’autres lettres des mêmes curateurs et bourgmestres, et même parfois des États ou du prince Maurice, au roi de France, ou à Louise de Coligny, ou à la duchesse de la Trémoïlle, ou aux principaux protecteurs et amis du savant qu’il s’agissait de décider. L’envoyé cheminait lentement, péniblement, dangereusement ; coûteusement aussi. Il faisait les offres. Sur un premier refus, nouvelles offres, nouveaux intermédiaires, nouvelles et plus magnifiques promesses : un ambassadeur français, à La Haye, n’ose-t-il pas garantir à Scaliger que « le