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LETTRES D’UN CHEF
À SES FILS

II [1]
A LA 3e ARMÉE EN ARGONNE


20 août 1915 [2].


... Je tiens, je crois, le secteur le plus chaud et le plus ingrat, mais dans l’intérêt d’autres « théâtres, » il faut que je me débrouille avec ce que j’ai. Enfin, à Dieu vat ! on fera de son mieux.


1er octobre 1915.

Les attaques du 25 septembre ont été admirablement montées et exécutées par ici. Sans le mauvais temps qui a bouché complètement l’horizon, les Boches étaient sûrement crevés sur un front de 20 kilomètres. Nous avons eu une guigne noire [3].

A l’Ouest de l’Argonne, ma première division a enlevé d’un bond toute la première position de l’ennemi. Or, les Allemands, qui avaient senti le danger, avaient préparé une contre-attaque sur la gauche. Lorsque celle-ci s’est déclenchée, une pluie très forte, un nuage opaque, masquait complètement nos vagues d’assaut ; lorsque les unités de contre-attaque ennemies ont été distinguées, on les a prises, dans ce nuage, pour des amis, et quand on s’est rendu compte de l’erreur, il était trop tard.

Par une autre guigne, un régiment qui était disposé en arrière de la gauche pour suivre notre attaque a été retardé à sa sortie des boyaux par les blessés qui en encombraient les issues et est arrivé trop tard.

  1. Voyez la Revue du 15 août.
  2. Le 22 juillet 1915. le général Humbert avait été nommé au commandement de la 3e armée en Argonne.
  3. Au cours des opérations de Champagne, la 3e armée avait eu mission d’attaquer par sa gauche sur la rive droite de l’Aisne en liaison avec la grande offensive des 2e et 4e armées.