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sont causés par des forces d’éloignement dues aux masses lointaines de l’univers.

Mais, tandis que Mach s’est borné à l’énoncé cursif de cette hypothèse, Einstein l’a soumise au critère victorieux du calcul et a montré, — c’est en quoi consiste le progrès essentiel apporté par lui sur ce point, — qu’une solution mathématique du problème de la rotation est possible, si les lois de la physique ont certaines propriétés générales. Si le mouvement de rotation est relatif par rapport à n’importe quelles masses situées à l’extérieur du système tournant, il ne pourra y avoir aucun système de coordonnées, aucun point de repères, aucun espace tels que certaines lois de la physique ne soient valables et exactes que par rapport à lui. S’il existait un tel système de repérage, nous pourrions toujours, par l’observation des phénomènes, reconnaître si nous nous trouvons dans ce système ou dans un autre qui soit en mouvement absolu par rapport à lui. Parmi tous les systèmes de repères imaginables, aucun ne doit a priori être considéré comme privilégié. Conclusion : les lois de la physique doivent être telles qu’elles soient valables pour n’importe quel mouvement du système de références, même si ce mouvement est une rotation.

On sait, — je l’ai exposé ailleurs avec quelque détail [1], — qu’Einstein a résolu mathématiquement le problème et donné une loi invariante du mouvement qui est très simple et peut s’exprimer ainsi : chaque point matériel abandonné à lui-même se meut suivant une ligne géodésique de ce continuum à quatre dimensions qu’on a appelé l’espace-temps et qui constitue le cadre de l’univers sensible. Les équations d’Einstein qui définissent les lignes géodésiques contiennent des coefficients caractéristiques qui dépendent d’une part de la quantité de matière et d’énergie électromagnétique présente dans l’espace, d’autre part du système de coordonnées auxquelles nous rapportons le mouvement observé du point matériel. Aussitôt qu’on a défini le système de coordonnées auxquelles on rapporte les observations faites (par exemple coordonnées géocentriques ou coordonnées héliocentriques, s’il s’agit d’observations astronomiques), le mouvement est entièrement déterminé par les équations d’Einstein. Il est à peine besoin de rappeler ici les découvertes

  1. Einstein et l’Univers, chap. VI.