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dans la théorie restreinte de la relativité, aucune vitesse de la nature ne peut, en un lieu donné, dépasser celle qu’y possède la lumière. C’est ce qui effectivement se produit dans l’hypothèse de la rotation diurne des étoiles autour de la terre. En un mot, chacun peut librement traiter les problèmes qui se posent selon ses convenances, soit en décrivant les phénomènes par rapport à une terre qui tourne et à un système de coordonnées lié aux étoiles, soit en les décrivant par rapport au ciel étoile en rotation et à un système de coordonnées lié à la terre immobile. Les lois fondamentales de la nature sont les mêmes dans les deux cas et c’est en cela que consiste essentiellement la différence entre la théorie de la Relativité et la science classique.

Galilée avait raison... mais ses adversaires, — je parle bien entendu au point de vue scientifique, — n’avaient pas tort. Seulement, ce que ni lui ni eux ne savaient, et ce qu’Einstein et ses précurseurs nous ont démontré, c’est que la raison de l’un n’entraînait nullement comme conséquence le tort des autres ou réciproquement. Si j’ose employer une image qui n’est qu’une analogie, la question de savoir si la terre tourne ou si elle ne tourne pas, est à peu près la même que la question de savoir si la route de Paris à Versailles passe par Sèvres ou par Virollay. La vérité, c’est qu’il y a deux routes directes, l’une passant par Sèvres, l’autre par Viroflay, et que chacun, selon ses commodités, son humeur et son point de départ, empruntera l’une ou l’autre.

Ainsi, c’est finalement une grande leçon d’indulgence et de tolérance mutuelles que la doctrine de la Relativité nous apporte dans cette question si inutilement, si âprement et si longtemps débattue. La terre tourne-t-elle ? Oui, si cela vous est agréable ; non, si cela vous déplaît...


CHARLES NORDMANN.