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toutes les mesures d’oppression dans les régions envahies. C’est là aussi que nous pouvons admirer, dans ce drame continu de la résistance, les grandes figures de nos administrateurs pendant la guerre, le maire de Lille, M. Delesalle, le préfet, M. Trépont, et son remplaçant, M. Anjubault, le premier adjoint, M. Crépy-Saint-Léger, le receveur municipal M. Wellhoff. L’évêque de Lille, Mgr Charost, dans cette défense financière, a tenu à mettre son autorité morale au service de la municipalité. Nous ajouterons à cette liste les chefs d’industrie, dans leur lutte contre les réquisitions, et les directeurs des maisons de banque, aux prises avec leurs séquestres, pour sauvegarder les intérêts de leur clientèle, tous étroitement unis dans un même effort afin d’éviter que l’on passe de la contribution à la réquisition, puis à la spoliation, et maintenir une certaine activité locale des affaires. Nous voyons là, dans toute sa beauté, le courage calme, la fermeté devant les menaces, la défense pied à pied contre les prétentions des envahisseurs, jusqu’au moment où les victimes de cette lutte vont expier leurs vertus civiques dans les camps de concentration [1].

Le système des contributions de guerre a fonctionné dès le premier jour de l’occupation, au milieu du flux et du reflux des opérations militaires. Le 11 septembre, les Allemands frappaient à la caisse et la ville de Lille était imposée d’une première charge de 252 000 francs par le commandant du 55e régiment de la Landwehr prussienne, en raison d’un article paru dans la Croix du Nord et jugé injurieux pour les officiers allemands.

Après la période d’accalmie qui suivit la bataille de la Marne, nous arrivons aux jours tragiques du commencement d’octobre, pendant lesquels Lille, sans défense, doit subir les horreurs d’un bombardement et d’un incendie qui détruisirent plusieurs quartiers. Le 12 octobre, la Ville étant définitivement occupée, commence le régime de terreur sous lequel vécut, pendant quatre ans, cette vaillante cité, devenue l’un des sièges de l’organisation allemande en pays envahis.

Avant le 1er novembre, la Ville avait déjà versé 1 300 000 francs et, sous le coup de nouvelles demandes, exposait à l’autorité

  1. Pour cette étude, faite d’après des documents officiels, nous avons mis à profit les obligeantes communications de M. Crépy Saint-Léger, et les renseignements recueillis par M. Louis Gigon, qui, tous deux, ont vécu les grandes heures de Lille tous l’occupation allemande.