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allemande que toutes ses disponibilités étaient épuisées et qu’elle ne pouvait espérer aucune recette. On lui répond en la frappant d’une contribution de guerre de 8 millions, à régler sans délai et sans discussion : ordre du général gouverneur von Heinrich.

Le 5 novembre, le maire, M. Charles Delesalle, adresse à ses concitoyens un émouvant appel pour leur exposer la détresse de la Ville et solliciter leur généreux concours. Il s’agit, en effet, de réunir cette somme en espèces, or et argent, ou en billets de la Banque de France, contre lesquels la Ville remettra des bons communaux, qui deviendront la seule monnaie courante pendant l’occupation.

Sur ce premier appel, la Ville obtient le tiers de la somme exigée, mais il faut éviter atout prix les sanctions dont la première serait la violation des biens privés. Pour ce nouvel effort, une grande voix se fait entendre, celle de l’évêque de Lille qui adresse à ses fidèles une lettre pastorale, magnifique exemplaire d’union sacrée. Cette lettre est lue en chaire, à chacune des messes dans toutes les églises et chapelles publiques où elle reste ensuite affichée.

Cela se passait en novembre : ce n’était qu’un commencement. Le 10 décembre, la scène s’élargit et ce n’est plus seulement Lille, ce sont les communes de la région lilloise qui sont invitées à payer. Ces villages n’ont plus aucune ressource et il est fait à l’autorité allemande un exposé lamentable de leur situation après les dévastations causées par le passage des troupes d’invasion. Les maires font observer que la plupart des cultivateurs ne vivent que des secours qui leur sont distribués par la commune. Les représentants des centres industriels ajoutent que, par suite des réquisitions opérées sur les matières premières, les usines ont dû cesser tout travail.

Le gouverneur von Heinrich leur répond par un excellent conseil et la menace très précise d’une sanction. Voici son ukaze ;


La plupart des communes de la banlieue de la forteresse de Lille ont déclaré ne pouvoir payer la contribution de guerre, vu qu’il n’y a pas de fonds dans ces communes. Il faut cependant que le paiement se fasse et pourra, de toute façon, se faire, si les communes veulent employer leur crédit. L’emploi du crédit étant difficile pour une commune seule, sera facile aussitôt que les communes, à l’exception de