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refusent à sortir de la légalité, le général von Heinrich annonce l’entrée en vigueur du système des sanctions. Communication est donnée de cette décision au préfet du Nord, par une lettre pleine de nouvelles menaces, non plus contre les biens, mais contre les personnes :


J’ai le ferme soupçon que vous encouragez les communes dans leur résistance passive. Je vous impose le devoir d’exercer sur les communes toute votre influence, afin qu’elles remplissent leur obligation vis-à-vis de l’autorité allemande, ponctuellement et totalement.

Si au 12 février 1915, les sommes arriérées ne sont pas payées par les communes, je procéderai contre vous.

J’ai menacé les communes mêmes de leur défendre l’importation de charbon, si les sommes échues ne sont pas versées au 12 février 1915.


A cette sommation le préfet du Nord répond par une protestation contre l’illégalité des mesures proposées, et revendique toute la responsabilité de cette résistance passive. Pour avoir soutenu les communes dans leur lutte contre la solidarité qu’on voulait leur imposer, en vue du paiement de leurs contributions et amendes, M. Trépont, préfet du Nord, est enlevé de Lille et emprisonné en Allemagne, dans une forteresse.


II

La sanction contre les communes récalcitrantes a été exécutée et, en plein hiver, tout combustible leur est refusé. Mais ce régime de terreur ne peut faire sortir l’argent là où il n’y en a pas. Aussi, l’effort de l’autorité allemande porte-t-il, à partir de cette époque, sur la ville de Lille qui, en raison de sa population plus dense et de son crédit, va être pressurée jusqu’à ses dernières ressources. C’est une contribution de 1 500 000 francs par mois, à raison de 300 000 francs tous les cinq jours, qu’elle est appelée à fournir, sous peine d’être aussi privée du charbon et des vivres nécessaires à sa subsistance.

Il ne suffit pas à la Ville de s’endetter en créant des bons communaux pour ses paiements, il faut encore qu’elle recherche l’argent allemand, les monnaies d’or et d’argent, les billets de la Banque de France, qui doivent entrer pour une part de moitié ou d’un tiers, suivant le cas, dans le règlement de la contribution. En principe, l’argent allemand, seul, a force libératoire et,