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de route ou une accélération de vitesse inattendue déjoue tous les calculs ; en outre, les nouveaux instruments d’écoute et la vue perçante des hydravions sont des avertisseurs très précieux pour les bâtiments menacés. Dans des mers fermées présentant obligatoirement des passages étroits le sous-marin reste un ennemi redoutable, mais sa puissance est limitée par sa vision restreinte et sa vitesse actuelle, et l’on comprend très bien que les convois américains aient pu sillonner l’Atlantique pendant un an sans perdre un seul bâtiment.


TANGER


6 mars.

Nous voici devant Tanger ; nid de verdure, blanches maisons, qui contrastent avec l’aspect assez sévère de la côte. Prévenu de notre arrivée par la télégraphie sans fil, le ministre de France, M. de Carbonnel, monte à bord, et je suis très heureux de revoir son adjoint, le consul Maigret, mon compagnon à Marrakech, qui veut bien me rappeler que l’arrivée rapide de ma colonne l’y délivra des mains d’El Hiba.

Je n’ai ici d’autre mission officielle que de témoigner la sollicitude du pays aux anciens combattants qui se sont réunis pour me recevoir. Leur président, M. Chenay, m’invite à un banquet pour le surlendemain ; il est bien convenu que nous resterons sur le terrain si solide de l’union entre les anciens combattants ; la situation est assez délicate et le statut de Tanger reste en suspens ; si ces braves Français y sont revenus après la guerre bien diminués en nombre, leur courage et leur ténacité se sont encore accrus, et un nouveau sentiment de discipline sait imposer silence à leur hâte de voir se fixer enfin le statut de leur ville, d’où dépend le fruit de leurs longs travaux.

Dès mon débarquement, je pus constater les progrès de l’organisation urbaine, et les constructions nouvelles montrent une activité agissante, où l’effort français tient la plus grande place : si les combattants ont laissé beaucoup des leurs sur les champs de bataille européens, d’autres Français les ont remplacés.

Conduit par le ministre de France, je rends visite d’abord au représentant du Sultan, le Naïb ; car, dans le territoire international de Tanger, comme dans les zones française et espagnole, nous restons dans l’empire du Maroc, soumis au Sultan qui descend du prophète, souverain temporel en même