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L’IMPÉRATRICE EUGÉNIE
ET
LE TSAR ALEXANDRE II
— SOUVENIRS —


1867

Le 1er juin 1867, l’empereur de Russie, invité par l’empereur des Français à visiter la grande exposition, arriva à Paris avec ses fils et une suite nombreuse au milieu de laquelle on remarquait le prince Gortchakoff. Napoléon III alla recevoir son hôte à la gare et il évita de le faire passer par le boulevard de Sébastopol, dont le nom lui aurait péniblement rappelé qu’il se trouvait chez ses vainqueurs. Le souvenir de la guerre de Crimée s’effaçait dans le lointain, mais entre la France, qui semble avoir la mission de protéger les opprimés, — même à ses dépens, — et l’Aigle russe, qui ne paraissait pas disposé à lâcher sa proie, se dressait l’ombre de la Pologne meurtrie : Paris était devenu pour les exilés le plus sûr des asiles contre les persécutions. Tony Robert Fleury venait d’exposer son chef-d’œuvre : les Massacres de Varsovie, qui avait été le clou du dernier Salon et que les illustrés avaient reproduit avec des commentaires tragiques, soulevant l’indignation et la pitié générales [1].

  1. Conduit d’abord aux Tuileries, puis à l’Elysée, le Tsar déposa son uniforme, et, après avoir diné, assista avec ses fils aux Variétés à la représentation de la Grande Duchesse de Gérolstein. Le choix de l’emploi de cette première soirée qui a étonné et surpris tout le monde indique clairement qu’on est venu à Paris pour se divertir avant tout. (Notes et souvenirs de Madame Baroche.)