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Et voici contre nous, l’argument suprême, bien propre à toucher l’opinion publique :


On fait valoir que, si la France avait accepté le programme anglo-américain, soit d’une considérable réduction dans le tonnage des sous-marins, soit mieux encore de leur abolition totale, le fardeau des impôts des contribuables aurait pu être considérablement allégé et la camaraderie des nations aurait été renforcée.


La camaraderie des nations ne sera jamais renforcée par les débats de la diplomatie en place publique, la seule qu’affectionne M. Lloyd George. Mais il faut reconnaître au Gouvernement anglais le mérite de savoir la faire servir à ses fins. Et M. Balfour, qui l’y a efficacement aidé, a reçu en récompense le très noble ordre de la Jarretière et la pairie.

Pour nous Français, traditionnels amis de l’Amérique, qui l’avons aidée à conquérir son indépendance, qui avons reçu d’elle les plus délirants témoignages d’admiration et d’amour quand nous arrêtions « les Huns » sur la Marne et à Verdun, nous qui étions alors « l’étoile au zénith » et qui avons entendu la presse américaine entonner en notre honneur le Gloria in excelsis, et proclamer que nous sauvions l’Europe, que nous sauvions l’Amérique, que nous sauvions le monde, que notre frontière était devenue la frontière de la civilisation, — nous lisons aujourd’hui des articles comme celui où M. Mark Sullivan, dans un grand journal de New-York, résume à sa manière la conférence de Washington et conclut :


La France a mal agi, il est inutile de chercher à atténuer la chose. Le mieux à faire, de beaucoup, est de laisser la France comprendre clairement quels sont les sentiments de l’Amérique à l’égard de l’obstruction qu’elle a faite contre cette grande entreprise d’idéalisme et de la laisser reconnaître que l’isolement moral dans lequel elle se trouve est son œuvre.

Non pas comme justification, ni même comme atténuation, mais plutôt à titre d’explication, certaines choses peuvent être dites... La France est le « nouveau pauvre » parmi les nations... La France a toute la susceptibilité d’un nouveau pauvre. Elle est la bénéficiaire d’une grande quantité d’œuvres charitables organisées par l’Amérique. Elle est notre « parente pauvre » et elle montre la fierté qui se rencontre fréquemment dans cette situation.


Fierté insupportable par laquelle s’explique, mais ne se justifie point, ni ne s’excuse notre attitude dans le règlement de la