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pas moins, pour une nation comme la nôtre, qui a un très grand déploiement de côtes dans plusieurs continents, et qui va, par suite d’une décision internationale, manquer de grandes unités, la seule arme défensive qu’elle puisse utiliser.

Dans l’allocution que je rappelais tout à l’heure, le Président de la République s’est plaint discrètement de l’incompréhension dont la France est parfois victime. M. Briand avait essayé d’ouvrir les yeux aux délégués qui siègent à la Conférence de Washington ; il est allé à Londres avec le désir d’y tenter la même opération. Il est parti fortifié par un double vote de confiance du Sénat. Une première fois, il avait sollicité et obtenu de la Haute Assemblée l’approbation des déclarations qu’il avait faites en Amérique et personne assurément ne pouvait rien trouver à redire à la belle plaidoirie qu’il avait prononcée pour la France. Dans le second débat, c’était sur une interpellation de M. Héry et à propos de l’ambassade du Vatican, qu’il était appelé à poser, de nouveau, la question de cabinet. Il a justifié l’envoi de M. Jonnart à Rome dans une série de discours qui compteront parmi ses meilleurs. Il a énuméré les raisons de haute politique internationale qui militaient en faveur du rétablissement de l’ambassade, traditions françaises en Orient, utilité d’une présence continue dans un poste diplomatique de première importance, avantage de nous y trouver auprès des jeunes nations qui viennent d’éclore et qui peuvent désirer nos conseils, certitude de donner une satisfaction au désir de la grande majorité des populations alsaciennes et lorraines. M. Briand a ajouté qu’il ne serait rien modifié à aucune de nos lois intérieures, et il a accepté un ordre du jour qui précisait cette pensée. Plusieurs orateurs de la gauche démocratique du Sénat, MM. Héry, François Albert, Doumergue, Renoult, Victor Bérard, ont cependant combattu, avec une grande vivacité, la thèse du Président du Conseil et exprimé des inquiétudes qui ne se seraient, sans doute, pas fait jour, si le débat avait eu lieu, en mars ou avril 1920, lorsque le projet a été déposé. Même après le vote de confiance, obtenu avec une majorité qu’il était aisé de prévoir, la question s’est représentée devant la Commission des finances et a réveillé les mêmes passions. Maintenant que le vote est acquis, il serait désirable que le calme se rétablit et que la France ne se désunît pas à l’instant où elle va avoir à résoudre les problèmes les plus formidables et où elle a, plus que jamais, besoin du concours de tous les bons citoyens.

M. Briand s’est vite trouvé, à Londres, devant un plan prémédité