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de Conférence internationale et il a aisément compris le danger d’y voir noyer les quelques questions urgentes et précises qui sont vitales pour notre pays. Il a donc tâché de se mettre, avant tout, d’accord avec l’Angleterre sur un certain nombre de points essentiels. Il était, d’abord, indispensable de dissiper le malentendu causé par les accords d’Angora. Dès avant le départ de M. Briand pour Londres, s’était produite une détente. L’Angleterre était elle-même arrivée peu à peu à la conviction qu’elle avait intérêt à faire la paix avec les Turcs et que jamais l’assemblée d’Angora n’accepterait le Traité de Sèvres. Les nouvelles des Indes ne sont pas assez bonnes pour que le cabinet britannique cherche à prolonger en Asie-Mineure un état de choses incertain et précaire. L’Angleterre ne pouvait pas, d’autre part, ne pas reconnaître que le Traité d’Angora ne nous apportait, en dehors de la suspension des hostilités, aucun avantage par rapport au Traité de Sèvres et qu’il nous imposait, au contraire, de pénibles sacrifices.

Elle était donc arrivée peu à peu à des idées plus conciliantes. Sans doute, il reste toujours quelques Anglais qui croient que tout l’Orient doit leur appartenir, en vertu d’un droit d’aînesse qu’ils s’attribuent assez arbitrairement, et aussi en raison des efforts qu’ils ont faits, en Asie-Mineure, pendant la guerre. Peut-être oublient-ils que, si nous avons envoyé moins de troupes qu’eux en Palestine et en Syrie, c’est parce que, dans l’intérêt commun, nous en gardions davantage sur le front occidental. Mais, à Gallipoli, nous nous sommes assez largement associés, je pense, à une entreprise dont nous n’avions pas eu l’initiative ; et à Salonique, c’est nous qui avons supporté le poids principal des opérations, ce sont nos généraux qui ont commandé en chef, et c’est le maréchal Franchet d’Esperey qui a finalement obtenu la rupture et déterminé les premiers armistices. Les Turcs ont été aussi bien vaincus dans la péninsule balkanique qu’en Asie-Mineure et l’armée française a, pour une grande part, contribué à leur défaite. Mais je ne veux pas m’attarder à des querelles de ce genre. Chacun des Alliés a rempli, à sa place, le devoir qui lui incombait ; chacun s’est battu de son mieux pour la cause commune ; lorsqu’un soldat de l’armée d’Orient tombait dans les champs de Macédoine, sa mort hâtait la libération de l’Alsace et de la Lorraine ; lorsqu’un poilu mourait à Verdun ou dans les Flandres, il facilitait l’action des Anglais en Orient.

L’affaire d’Angora une fois écartée et, sinon arrangée, du moins débarrassée de son venin, se présentait la question qui, pour la