Page:Revue des Deux Mondes - 1922 - tome 7.djvu/251

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ministère de l’Instruction publique ! J’ai pensé qu’un statut non écrit, et d’autant plus certain par là-même, régissait les rapports des deux institutions et que ces rapports dérivaient de la nature des choses. Et je me suis rendu, avec grand plaisir et avec un empressement naturel, à l’invitation de M. René Doumic.

Un ministre de l’Instruction publique ne trouverait-il pas sous quelques-unes des grandes rubriques de la Revue, de bons préceptes, de bons exemples, de bons modèles à suivre dans ses propres rubriques, je veux dire dans les domaines divers où son activité s’exerce, au hasard des délibérations, des inaugurations et des centenaires ? Critique littéraire, critique dramatique, histoire, critique d’art : je touche à tout cela, au gré de l’ordre du jour et du calendrier, sous la double caution du contrôle parlementaire et de la solidarité gouvernementale. Sur tous ces sujets, je rencontre dans la Revue des leçons parfaites. J’y rencontrerais au besoin, si l’Instruction publique n’était un ministère de technicité rigoureuse, de hautes leçons de politique proposées par un maître à qui m’attache depuis vingt ans la plus respectueuse, la plus reconnaissante affection.

Je me suis demandé ce que je pouvais bien vous apporter en échange de ces secours spirituels. Il ne dépend pas de moi sans doute que la Revue des Deux Mondes et les Revues, ses voisines, qui sont représentées autour de cette table, trouvent encore des lecteurs dans vingt-cinq ans d’ici. Telle n’est point ma prétention. Je ne songe ni à créer une panique intellectuelle, ni à me révéler devant vous comme le maître du destin. Je dirai seulement que je travaille à vous préparer un public pour demain, en servant de mon mieux, selon mes moyens et selon mon pouvoir, ce que vous servez vous-mêmes : les intérêts de la haute culture et l’influence de l’esprit français.

M. René Doumic a bien voulu parler avec faveur d’un projet de restauration des humanités classiques. J’ai dit restauration... Comme le mot propre est souvent un mot dangereux ! Car nous sommes tout justement en un sujet où tout deviendrait assez facile si le sophisme n’usait de certains mots, et si de certains mots n’avaient la terrible vertu de susciter et de nourrir le sophisme. La controverse et même la dispute sont légitimes et utiles en un tel débat.

Que ne s’accorde-t-on à en exclure des arguments qui rappellent de moins nobles polémiques ? Vous professez qu’il convient de faire à la tradition sa part dans un plan d’études. Vous affirmez la solidarité historique de la prose française et de la prose latine, telle qu’un des plus illustres collaborateurs de la Revue, M. Paul Bourget, la définissait