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Page:Revue des Deux Mondes - 1922 - tome 7.djvu/478

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contraste avec l’égoïsme et la brutalité des jeunes, ils sont, eux, réservés, discrets et reconnaissants de la moindre offrande. Tel est le protecteur de Jessie, type classique et falot du fêtard à la vieille mode. Il faut entendre de quel ton ému et déférent il accueille, et même il provoque, au seuil des noces illégitimes, les recommandations de Mme Cordier, sa belle-mère de la main gauche. La scène, avec un brin d’humour, aurait pu être vraiment drôle. Hélas ! elle est traitée avec un imperturbable sérieux. Ces gens-là n’ont pas le sourire.

Tout est donc convenu ; tout est au mieux dans le meilleur des demi-mondes ; c’est l’irrégularité la plus régulière, l’inconduite la plus familiale. Jessie met la dernière main à ses préparatifs de départ, lorsque quelqu’un vient troubler la fête. C’est un adolescent, Max, ami d’enfance de Jessie. Ils ont tous deux polissonné dans les coins, et le jouvenceau réclame ses droits. En vain Jessie essaie-t-elle de l’apaiser, en lui faisant pour un prochain avenir les promesses les moins honnêtes et les plus sacrées ; il ne veut rien entendre : il reste énigmatique et menaçant. Mais le temps presse. Déjà l’automobile fleurie, qui doit emmener Jessie vers Cythère, est au perron. Alors, s’adressant à Mme Cordier et aux autres membres de la famille, et parlant à leur personne, le jeune Max leur jette à la figure un gros mot, qui est éminemment le mot de la situation.

Une mère qui vend sa fille, une demoiselle qui entre en galanterie, un vieux galantin qui fait le jeune homme, certes ce n’est pas la première fois que nous voyons ce joli monde au théâtre. Il a déjà défrayé je ne sais combien de vaudevilles. Mais dans le vaudeville, l’énormité de la fantaisie fait passer bien des choses. Il n’y a pas de fantaisie dans la Possession, pas d’ironie, pas de drôlerie, pas d’esprit. Un cynisme ingénu, dont rien ne vient égayer la platitude.

Au second acte, de plus en plus, le vaudeville nous guette. Cette fois, c’est le vaudeville à portes et fenêtres. Chez le duc ; la chambre à coucher, somptueusement préparée pour la nuit de noces : il y a des viandes froides et des vins fins, il y a des tziganes ! Jessie est un peu émue ; le duc, toujours très convenable, commence à s’enhardir, lorsque le maître d’hôtel lui apporte un message : il est mandé d’urgence auprès de son fils, victime d’un accident. Sortie du duc. Aussitôt, on gratte à la porte-fenêtre. Une voix appelle, que Jessie reconnaît pour la voix de Max. Que vient-il faire, à pareil endroit et à pareil moment ? Ce garçon est insupportable ! C’est lui qui a imaginé le truc de l’accident. Il s’est caché parmi les musiciens, et, pendant que deux de ses camarades tiennent le duc éloigné, il compte bien