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d’avertir Max, et, autant que possible, de le consoler. Passerose est bonne fille : elle fait de son mieux. Pour se donner du courage, elle se bourre le nez de cocaïne et s’abreuve de Champagne. La voilà complètement saoule. Il faudra, pour la dégriser, le coup de pistolet que Max se tire en pleine poitrine. Prostitution, cocaïne, scène d’ivresse et suicide sur la scène, rire convulsif et convulsions d’agonie, boue et sang, rien n’y manque.

Dernier acte. A Louveciennes, dans un paysage de neige, retour du cimetière où Max a été enterré. Serge a cru devoir venir en personne offrir ses condoléances. Il est reçu de la belle manière. Comme il s’en retourne, contrit et l’oreille basse, il se croise avec son père : je vous dis que, dans cette pièce, tout se passe en famille. Une fois de plus, le vieux duc est exquis de politesse, irrésistible de gentilhommerie. Loin de lui toute arrière-pensée dont pourrait s’offenser la douleur de Jessie ! Mais le hasard veut qu’il possède dans les environs une maison des champs, qui est tout à fait de deuil ; il la met à la disposition de la jeune veuve : il n’y a que lui pour avoir de ces délicatesses. Le temps de boucler sa valise et Jessie repart dans l’auto du premier acte, dégarnie de ses fleurs. Ainsi tout rentre dans l’ordre. Jessie reprend sa carrière au point où elle l’avait laissée : elle en aura été quitte pour un détour. Un peu de retard, un peu d’aventure, et tout finit bien : il n’y a qu’une inconvenance de plus dans le théâtre contemporain.

Mlle Yvonne de Bray est excellente, quoique un peu trépidante, dans le rôle de Jessie : elle le joue avec beaucoup de vie et trop de nerfs. M. Paul Bernard, dans le rôle de Max, donne à merveille l’impression de la jeunesse et de la passion juvénile. Et Mlle Sylvie a composé le personnage de Passerose avec un réalisme qui ne laisse rien à désirer.


RENÉ DOUMIC.