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à elle dans l’examen de la situation financière de l’Allemagne et, au lieu de la laisser tranquillement remplir son mandat, il a lui-même discuté les réponses du Reich à la Commission et convoqué à Cannes les représentants de Cabinet de Berlin. Or, c’est devant la Commission qu’aux termes du § 10 de l’annexe II à la partie VIII, il doit être donné au Gouvernement allemand « l’équitable faculté de se faire entendre, » et cela, « sans qu’il puisse prendre aucune part, quelle qu’elle soit, aux décisions de la Commission. » Malheureusement, nous semblons nous être hypnotisés, je ne sais pourquoi, sur les échéances immédiates et, dans la crainte que la Commission ne fût amenée à accorder, conformément au paragraphe 13 de la même annexe, un report total ou partiel des prochains paiements, nous avons cherché à sauver notre mise, au risque de sacrifier l’avenir au présent. Voilà plusieurs mois que j’ai signalé les dangers de cette myopie financière.

Il est beaucoup moins important pour nous de toucher demain cent ou deux cents millions de plus que de nous assurer, pour après-demain et pour plus tard, le maintien total de notre créance et le droit de nous faire payer. Nous avons discuté à perte de vue sur la révision de l’accord du 13 août et sur la priorité belge, et nous avons maladroitement donné au Cabinet de Bruxelles et à nos amis de Belgique l’impression que nous avions l’arrière-pensée d’engager avec eux, ou contre eux, je ne sais quel marchandage. Visiblement, il y avait eu, à cet égard, des imprudences commises dans les entretiens de Londres. Lorsque M. Briand était arrivé en Angleterre, il avait trouvé M. Lloyd George occupé à étudier un vaste plan destiné à bouleverser de fond en comble l’état de paiements. On aurait fait remise à l’Allemagne des obligations de la série C, et, en retour, l’Angleterre et l’Amérique auraient renoncé à leur créance sur la France. Mais l’Amérique ne paraissant pas se soucier d’être mêlée à ces combinaisons, les projets de M. Lloyd George avaient été provisoirement relégués dans un dossier d’attente, sans que nous fissions nous-mêmes connaître clairement nos volontés futures, et tout le débat avait alors porté sur la situation actuelle. Dans l’impatience d’obtenir, tout de suite, un avantage, nous avons réclamé, pour la France, une sorte de privilège dans les versements de cette année, sans songer qu’une fois ce privilège obtenu, nous n’aurions plus la même autorité pour demander, dans notre intérêt permanent, des garanties et des gages. En procédant ainsi, nous nous exposions naturellement à ce qu’on nous répondit : « Du moment où vous allez