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dans le budget un déficit de plus de quinze cent mille francs. Mais, sur un signe de l’Université, le trou a été immédiatement comblé par les anciens élèves, qui se sont cotisés pour tirer leur Alma Mater d’embarras. Hardiesse étonnante, qui va droit de l’avant, fait le nécessaire, sans hésiter, dans la certitude que l’équilibre est toujours rétabli quand on le veut ! La fortune ne favorise-t-elle pas les audacieux ?

Oui, hardiesse étonnante ! Mais aussi admirable entente des affaires ! Cette Université est administrée comme une entreprise industrielle. Nous avons vu qu’elle a une usine ; elle a en outre un bureau de poste et un bureau d’achats où sont centralisées toutes les commandes. D’ailleurs, point de bureaucratie routinière et paperassière, point d’intervention tyrannique de l’Etat. A la Corporation, ou Comité qui gère l’Université, à côté du président et du secrétaire, représentant l’élément pédagogique, et du Gouverneur, défenseur des intérêts de l’État de Connecticut, figurent seulement d’anciens élèves, élus par leurs camarades. Ce sont, pour la plupart, des hommes d’affaires qui ont acquis par leur richesse ou leur intelligence des situations importantes. Et, pour exécuter les décisions de ces hommes qui ne se paient pas de mots, un spécialiste de la finance. Au moment où j’écris, je le revois dans son cabinet, le visage jeune, mais grave, de gestes délibérés, fort aimable, mais avare de paroles, comme pour vous faire comprendre à vous, le parleur de profession, qu’en affaires le plus court est le mieux dit. Sa carrière est claire comme les bilans qu’il a l’habitude de dresser. Il a commencé par être « clerk » dans les bureaux de son père, agent de change à New York. Puis il devint associé, chef de maison. Maintenant il a vendu sa charge pour administrer la fortune de l’Université dont il est fier d’être alumnus. Cette fortune est en de bonnes mains. En fait, elle augmente avec une prodigieuse rapidité. Il y a dix ans, les fonds proprement dits n’étaient que de cinquante-deux millions six cent mille francs ; il y a cinq ans, ils approchaient de soixante-dix-sept millions ; en 1918, ils avaient dépassé cent seize millions. Les revenus ont naturellement grandi en proportion et les dépenses aussi, pour le bien des études.