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de leur baccalauréat pour occuper positions lucratives dans ses bureaux. La connaissance de l’espagnol est nécessaire. » Ou bien : « MM. Y et Co, de New-York, offrent bonnes situations à gradués du Collège de A. dans leur bureau central d’exportation. Pour tous renseignements s’adresser au Doyen. » Et quel optimisme une pareille croyance ne donne-t-elle pas ! « Au savoir tout est possible » est une formule un peu simple, mais magique, qui stimule les ambitions et fait surgir les mérites. Puisque pour réussir il suffit d’avoir appris, quelle hésitation arrêtera celui qu’aiguillonnent l’énergie et la volonté ? C’est ainsi que s’explique, en partie, l’audace tranquille des hommes de ce pays. Sans doute, il y a dans cette qualité un reste de l’esprit d’aventure qui animait les premiers colons de ce vaste continent. Ils partaient, ces pionniers, au hasard, vers l’inconnu, sans savoir ce qui les attendait aux profondeurs émouvantes de la forêt ou dans les déserts effarants de la prairie. Et cette habitude qu’ils avaient prise de se fier à la chance, de ne compter que sur eux-mêmes, ils l’ont léguée à leurs descendants. Mais maintenant que forêt et prairie ont perdu beaucoup de leur mystère, ces instincts n’auraient plus où se prendre s’ils n’étaient soutenus par cette religion du savoir tout-puissant.

Voilà donc la force qui pousse ces jeunes gens au front clair, aux regards assurés, aux mâchoires volontaires, et qui développe en eux cette confiance facilement bousculante assez semblable au premier abord à de l’effronterie mais qui est seulement l’affirmation un peu brusque d’une conviction profonde ignorant les obstacles et bien décidée à n’admettre aucune entrave dans la poursuite du succès. Quand ils entrent à l’Université, ces jeunes conquérants doivent cependant abdiquer un peu de leur farouche indépendance. La liberté dont ils jouissent, si grande soit-elle, n’est pas entière. Elle est limitée par une surveillance discrète, sans tracasseries, mais réelle. Les étudiants sont divisés en petits groupes sous le contrôle de professeurs qui jouent le rôle de mentors auprès de cette jeunesse ardente. Des conseils de discipline jugent tous ceux qui se conduisent mal. Et puis, il y a les dormitories. Tous les élèves du Collège, à moins que leurs parents n’habitent à New Haven, sont tenus d’avoir leur chambre dans l’un des halls. Ils peuvent aller et venir à leur guise ; aucune heure n’est fixée pour la rentrée du soir. Mais dans ces dormitories logent aussi des instructeurs