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il a pris l’enseignement du « scripteur « Ange Vergèce. Ledit Ange Vergèce a la « librairie » du Roi, qui est à Fontainebleau, que Charles IX transportera au Louvre. La « librairie » de Catherine de Médicis, aux Tuileries et plus tard au château de Saint-Maur-les-Fossés, lui fut ouverte, ainsi que la « librairie » de Henri de Mesmes, et celle du premier président de Thou, et celle de Jean Hurault, seigneur de Boistaillé, ancien ambassadeur à Venise, à Constantinople, et qui avait acquis là-bas de remarquables volumes.

Concluons avec M. de Nolhac : « Il faudra nous imaginer Ronsard penché sur les volumes vénérables, tournant avec respect les feuilles de papier ou de parchemin, retrouvant sous cette forme nouvelle les ouvrages que les éditions de Lyon ou de Venise, de Bâle ou de Strasbourg, lui ont rendus familiers... » N’est-ce là qu’une imagination ? Rémi Belleau dit à un papillon de s’envoler vers Ronsard :


Tu le trouvras dessus Nicandre,
Sur Callimaque ou sur la cendre
D’Anacréon, qui reste encor
Plus précieuse que n’est l’or,
Tout recourbé, moulant la grâce
De ses traits à l’antique trace
Sur le patron des plus secrets
Poettes romains et poettes grecs
Pour nous reclaircir leur vieil âge.


Ce Ronsard, que Rémi Belleau connaît bien, c’est un philologue.

J’en suis fâché pour diverses personnes qui, de nos jours, prétendent séparer comme deux choses très différentes, et à peu près incompatibles, l’humanisme qu’elles approuvent et la philologie qu’elles dédaignent. L’on va même jusqu’à nous raconter que l’humanisme est de chez nous et que la philologie est allemande. Puis l’on essaye de ridiculiser la besogne des érudits. Or, l’humanisme et la philologie ne sont pas incompatibles : et, tout au contraire, l’humanisme a besoin du secours de la philologie. Un secours ? Non. La philologie est sœur de l’humanisme. On le sait pourtant, que la littérature de la Grèce et de Rome ne nous a pas été transmise en bon état, mais endommagée par des copistes ignorants ou pressés. L’on sait que tous les livres imprimés sont pleins de fautes ; et, si l’on a cherché un jour un peu d’exacte vérité dans les livres, l’on sait qu’il convient de se méfier d’abord et constamment. Si vous aimez, en bon humaniste, l’Antiquité, si vous êtes curieux du vrai visage d’Athéna, vous