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d’Irlande et d’un évêque d’Irlande, écrivait-il, n’est point enfermée dans les limites du sanctuaire. De tout mon pouvoir, j’ai réclamé dans le passé, je ne cesserai de réclamer dans l’avenir, et de réclamer sans crainte pour notre patrie, la première de toutes les bénédictions sur un peuple et sur un pays, la bénédiction de la liberté et de la vie nationale. »

Le carême de 1919 mobilisait les protestations épiscopales « L’Irlande, grondait le cardinal Logue, reste privée du droit, aujourd’hui si hautement revendiqué comme naturel à toute nation libre, d’avoir le contrôle plein et entier de ses propres affaires. » L’archevêque de Cashel observait douloureusement : « La guerre a été engagée, dit-on, pour sauver le monde en faveur de la démocratie et assurer la liberté aux nations petites et grandes. Ces belles phrases ne sont que pure insulte à la vérité : la liberté n’est pas accordée à l’Irlande, qui est une des plus anciennes nations civilisées de l’Europe. » « Tandis que chez eux, reprenait l’évêque de Killaloe, les Anglais foulent l’Irlande aux pieds, ils siègent parmi les autres nations à la conférence de la Paix, demandant la self-détermination comme un droit sacré pour tous les peuples, même pour les races de couleur. Nous protestons contre cette hypocrisie éhontée. »

Le terrorisme s’établissait en Irlande : d’atroces représailles s’échangeaient, dont ici même M. Louis Paul-Dubois traçait le tragique tableau : il y avait du sang de prêtres, dans ce sang irlandais qui coulait [1] ; les évêques voyaient et sentaient l’injustice provoquer l’injustice, le crime provoquer le crime. Était-ce donc, pour longtemps, la faillite du droit et du Christ ? Ils signifiaient tous ensemble aux évêques du monde entier :


Les pasteurs ne parviennent que difficilement à maintenir la loi divine et à en assurer la pratique, pendant que l’oppression sévit à travers le pays. S’il y a anarchie en Irlande, les ministres de la couronne britannique en sont les fauteurs. Ce qui réglera la question irlandaise, ce n’est pas la répression impitoyable, c’est la reconnaissance du droit indéfectible de l’Irlande comme de toute nation, de choisir la forme de gouvernement sous lequel son peuple aura à vivre.


L’Osservatore Romano, organe du Vatican, s’occupait de ce peuple que Benoit XV avait appelé « l’héroïque peuple irlandais,

  1. Meurtres du vicaire Griffin et du chanoine Magner en 1920. (Brown, Etudes, 5 février 1921, p. 290-300.)