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réellement la nuit ? Non, car il n’y a pas d’ombre. C’est donc le jour ? Non, car il n’y a pas de lumière ; il n’y a que des lueurs de crépuscule et d’aurore. Sur la voûte blanchâtre du ciel, on distingue, çà et là une vague palpitation d’étoiles. A la pointe de l’île Iélaghine, les flots du golfe de Finlande oscillent sous une buée de vapeurs phosphorescentes et argentées. Dans une atmosphère opaline, les bouleaux et les chênes qui bordent les lacs semblent une forêt magique, un décor de rêve et d’incantation...



Samedi, 8 juillet.

Sur le front de Riga et dans la région du lac Narotch, les Russes enlèvent toute une série de positions allemandes.

Au centre, ils avancent sur Baranovitchy.

En Volhynie, ils franchissent le Stokhod et s’approchent de Kovel.

En Galicie, ils s’étendent le long des Carpathes.

Depuis le 4 juin, ils ont fait environ 266 000 prisonniers.

Sazonow me répète ce matin :

— C’est maintenant que les Roumains devraient marcher !

Malgré cette longue suite de succès, le public russe manque de confiance. Il n’admettrait pas qu’on mît fin à la guerre avant la victoire ; mais il croit de moins en moins à cette victoire.



Dimanche, 9 juillet.

Briand reconnaît enfin que, pour obtenir l’intervention de l’armée roumaine, ce n’est plus à Pétrograd qu’il faut agir, c’est à Bucarest. Il vient donc de faire pression sur Bratiano et de le mettre, en quelque sorte, au pied du mur.

Voici la conclusion des instructions adressées à notre ministre, Blondel :

Toutes les conditions posées par M. Bratiano sont aujourd’hui remplies. L’intervention de la Roumanie, pour avoir une valeur, doit être immédiate. L’attaque vigoureuse des armées autrichiennes décimées et en retraite est une tâche relativement facile pour les Roumains et extrêmement utile aux Alliés. Cette intervention achèverait de démoraliser un adversaire déséquilibré et permettrait à la Russie de concentrer toutes ses forces contre l’Allemagne, en donnant à son offensive son maximum d’efficacité.