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s’explique par la fatigue des hommes et des chevaux, par la difficulté croissante des communications à l’arrière, par l’usure de l’artillerie, enfin par la nécessité de ménager les munitions.

Ainsi, la Roumanie entre dans la guerre au moment où l’offensive russe est à bout de souffle.



Samedi, 2 septembre

Le forban policier, Manouïlow, dont Sturmer a fait le chef de son secrétariat, vient d’être arrêté ; il serait inculpé de chantage à l’égard d’une banque, ce qui est prouvé d’avance ; car l’escroquerie est son gagne-pain normal, le plus habituel comme le plus véniel de ses péchés.

L’incident ne vaudrait pas d’être noté, si l’arrestation n’avait été décidée par le ministre de la Justice, Khvostow, et opérée à l’insu de Sturmer. Il y a donc quelque dessous, plus ou moins scandaleux, qui apparaîtra bientôt.



Dimanche, 3 septembre.

En Galicie, les Russes progressent vers Kalicz.

Au Nord des Alpes Transylvaniennes, les Roumains s’emparent de Brasso. Dans la région supérieure du Séreth moldave, ils opèrent en liaison avec les Russes et franchissent les Carpathes.

Du côté de Salonique, l’armée du général Sarrail attaque avec prudence.

Sur la Somme, reprise énergique de l’offensive anglo-française.



Lundi, 4 septembre.

A l’heure du thé, chez Mme S..., nous parlons de l’ennui, qui est le mal chronique de la société russe.

Debout, haute et souple, les mains croisées derrière le dos, comme elle se tient d’habitude, la jolie princesse D... nous écoute en silence. Un regard sceptique et rêveur brille au fond de ses yeux fauves. Soudain, elle laisse tomber négligemment ces mots :

— C’est curieux. Vous autres hommes, quand l’ennui vous prend, il vous abat, il vous fauche les jambes ; vous n’êtes plus bons à rien ; on s’éreinte à vous remonter. Nous autres