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lecteurs. Mais, par patriotisme, par esprit politique aussi, il s’est abstenu de critiquer publiquement les dispositions du traité de paix. Il a accepté la situation de fait que la guerre, — et la volonté anglo-saxonne, — ont créée à la France ; il a sincèrement admis que les destinées de la Rhénanie se développassent dans le cadre de l’Empire allemand ; mais il n’en a pas moins voulu poursuivre son œuvre de rapprochement franco-rhénan : et pour donner plus de retentissement à son effort de propagande, il a professé à l’Université de Strasbourg sur le Génie du Rhin une série de leçons qui, recueillies en volume, ont pour objet de tracer aux nouvelles générations françaises tout un programme d’action en pays rhénan.

Livre très généreux, puisqu’il écarte, de propos délibéré, les souvenirs douloureux de la dernière guerre, et puisqu’il se défend bien de violenter en quoi que ce soit les aspirations naturelles des populations rhénanes. Livre de poète et d’artiste au moins autant que de moraliste et d’homme politique. » Ce qui m’a poussé, avoue-t-il, c’est mon amour du sujet que je voulais traiter. Un tel amour que je ne peux voir où que ce soit, dans la page la plus morne du livre le plus insipide, le nom du fleuve brillant et mystérieux, sans en recevoir une espèce de commotion, un prodigieux éveil d’intérêt, une curiosité de tout l’être. » Et encore : « Magie des nuées qui flottent sur le fleuve et ses collines ! Nous tous, gens des deux rives, que nous nous tournions en esprit vers le Rhin, aussitôt nous sommes pris d’un tressaillement de poésie et d’un mystérieux attrait. » Et il a beau vouloir « se discipliner » et « se circonscrire, » « concentrer et refroidir son sentiment pour le rendre plus opérant : » il est visible que son « imagination, hantée par le romantisme du Rhin, » a donné le branle à sa sensibilité et à sa réflexion, bref, qu’il a été comme ressaisi par le génie de sa race, ce « Mosellan qui trouve dans la vieille Lotharingie son parfait climat moral, » et que, tout en s’efforçant d’exprimer, sur ces graves questions, « la pensée de la France, » il cède obscurément à ces « puissances invincibles du désir et du rêve » qui peut-être, à leur insu, conduisent mystérieusement tous les hommes...

On ne saurait nier en tout cas que la question soit admirablement posée par le conférencier dans la Préface de son livre :


Puisque des rapports de tous genres sont inévitables entre la France et la rive gauche que les armées alliées occupent, la meilleure