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la haute autorité nécessaire pour présider la Conférence de Gènes ; la crise et les incidents qui s’en sont suivis n’ont pas non plus renforcé la popularité du Parlement dans le pays.

A Fiume, les fascistes et les nationalistes en armes ont obligé le gouverneur, M. Zanella, à abandonner le pouvoir et à s’enfuir ; on l’accusait de vouloir aliéner les revenus du port et des chemins de fer à des étrangers ; le Gouvernement italien est obligé d’envoyer des troupes pour maintenir l’ordre. De tels incidents sont dangereux parce qu’ils perpétuent la mésintelligence entre Italiens et Yougoslaves. L’opinion italienne, si résolument pacifique, commence à trouver que vraiment les gens de Fiume abusent.

Le maréchal Allenby a emporté de Londres et publié aussitôt après son retour au Caire une proclamation par laquelle l’Angleterre renonce à son protectorat sur l’Egypte, proclamé le 17 décembre 1914. C’est un acte politique de haute portée, dont les conséquences seront considérables et nous intéressent à plus d’un point de vue. Depuis le rapport de lord Milner, les Anglais clairvoyants étaient convaincus qu’il faudrait en venir à une telle solution, si pénible qu’elle pût paraître à leur amour-propre national. Les négociations avec Adly pacha n’ayant pu aboutir, M. Lloyd George prit brusquement la décision d’en finir et accorda à l’Egypte l’indépendance par un acte unilatéral, par une décision souveraine du Gouvernement britannique, mais à certaines conditions : sécurité des communications impériales, ce qui implique la surveillance du canal de Suez, du Nil, des chemins de fer et routes conduisant au Soudan ; défense de l’Égypte contre toute agression ou ingérence du dehors, soit directe, soit indirecte ; protection des intérêts étrangers et des minorités étrangères ; séparation du Soudan d’avec l’Egypte, le statut du Soudan n’étant pas modifié. Un Cabinet égyptien a été constitué sous la présidence de Sarwat pacha et est entré en négociations avec le Gouvernement de Londres pour la réalisation de l’indépendance et l’observation des quatre points qui en sont la condition absolue. Jusque-là, le statu quo sera maintenu et, en attendant, Zagloul pacha, le chef populaire du parti nationaliste, vogue, sur un destroyer britannique, vers les îles Seychelles où le Gouvernement anglais le déporte. L’Egypte jouira de tous les droits d’un État souverain, aura son Parlement et sa représentation diplomatique à l’étranger.

La proclamation de l’indépendance de l’Egypte touche par plusieurs points aux intérêts et à la politique française. La renonciation de la Grande-Bretagne à son protectorat par un acte spontané de