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russes socialisées. Nous avons fini par tomber d’accord sur la base de cette concession réciproque. Le traité aurait pu être signé à Berlin, il y a un mois. Mais nous avons été pris d’un scrupule : puisque nous venions à Gênes, ne devions-nous pas d’abord essayer d’obtenir des Alliés la suppression de l’article 116 ? Quatre jours après notre arrivée ici, M. Lloyd George inaugure, à la villa De Albertis, des conciliabules où les Russes sont admis, et dont nous sommes exclus. Ces conversations se poursuivent durant plusieurs jours ; nos agents de renseignement nous avisent qu’elles vont aboutir à d’importants résultats. Ces résultats ne pouvaient être acquis qu’à nos dépens. Soucieux de n’être point joués, nous avons aussitôt signé l’accord avec les Russes. »

Le matin, M. Lloyd George a manifesté très directement aux délégués allemands sa surprise et son indignation. Ma seule inquiétude — et je ne me tiens pas de l’avouer ici, — est que la France ne fasse une fois de plus les frais d’une réconciliation qui ne lui est nullement indispensable, et qui ne servira que les desseins, très particuliers, du Premier ministre de la Grande-Bretagne. Hier soir, dînant chez M. Albert Thomas avec quelques représentants des démocraties européennes, M. Lloyd George fit cette déclaration : « Si la Conférence de Gênes aboutit à un échec, c’est la ruine de l’Europe ! » Toute la question est de savoir par quels moyens le Premier anglais prétend assurer le succès de la réunion qu’il a provoquée et qu’il se flattait de diriger en maître.