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Page:Revue des Deux Mondes - 1922 - tome 9.djvu/404

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derrière son « melon » avec autant de précipitation que s’il avait perdu toute sa tête...

La Seine houleuse et fauve est limoneuse comme le Meschacébé... elle a des vagues... elle écume ; sur ses rives, les tramways paraissent avoir perdu leur aplomb de joujoux solides... les voitures ronchonnent, furieuses ; le vieux mendiant habituel, au lieu d’être figé, immobile, paraît prêt à courir derrière une aumône ailée ; toute pierre s’allège ; au loin, Notre-Dame s’envole grise et rose ; l’île va rompre ses amarres ; les arbres, encore sans feuillage se dressent comme des mâts ; un chaland vogue avec un grand bruit maritime et, dans la limpidité cassante du froid après-midi d’avril, s’élève, appelle et se lamente le cri si beau d’un remorqueur.


L’EXPOSITION DE MAXIME DETHOMAS AUX ARTS DÉCORATIFS

Puisque, au gré de ce grand vent, nous avons erré dans ce quartier, arrêtons-nous au musée des Arts décoratifs ; nous ne le regretterons pas.

C’est un musée que j’aime : tout y est mis parfaitement en valeur avec le goût le plus sûr ; et, par les hautes fenêtres claires, l’on peut contempler un des plus jolis jardins de Paris, dont l’harmonie est un repos, dont l’ordonnance est un charme.

Dans ces belles salles, Maxime Dethomas expose toute une nombreuse et importante série de dessins et de tableaux, d’une variété, d’une solidité, d’une puissance d’expression et de dessin, d’une simplicité de couleurs, enfin d’une vie si forte qu’on les salue comme les œuvres d’un maitre.

Ce n’est pas à moi d’en dégager tout le sens plastique, et d’expliquer le « pourquoi » et le « parce que » de ces mérites évidents. Les artistes, les « gens du métier, » le sauront faire avec les épithètes justes et les phrases savantes. Mais, peut-être est-il permis au profane, qui a ressenti, en face de ces œuvres, une impression très vive et très durable, de décrire quelques-unes d’entre celles-là qui lui ont donné le plaisir le plus direct.

Je veux parler de vous, Voyageuse grise, blanche et noire, et déjà toute aux couleurs du voyage, du charbon, de la mouette et de l’inconnu ; sur un quai, au milieu de tous vos sacs amoncelés, vous attendez avec une résolution têtue le bateau qui va