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posée, il y a deux ans, en présence du roi : on espère que la construction sera achevée en 1925. Tandis qu’à Rome archéologues et artistes vivent séparés, ceux-là au Palais Farnèse, ceux-ci à la Villa Médicis, ils seront réunis à la Villa Velazquez, dont ce sera l’originalité.

Tel est, sous son double aspect, cet Institut français de Madrid. Qu’il s’efforce de faire connaître à l’Espagne la France d’aujourd’hui ou à la France l’Espagne d’autrefois, ces deux formes de son activité sont également justifiées. Les civilisations française et espagnole ont mêmes racines antiques et chrétiennes. Les deux peuples ont même idéal, et si l’honneur appartient à l’Espagne d’avoir créé la figure immortelle du bon chevalier de la Manche, combien de fois, dans l’histoire des peuples, le personnage de Don Quichotte n’a-t-il pas été tenu par la France ? Au XVIIe siècle. Corneille doit son Cid à l’Espagne, et Molière, à travers l’Italie, lui emprunte son Don Juan. Le XVIIIe siècle a Gil Blas et Figaro. Notre romantisme, avec Victor Hugo et Théophile Gautier, est tout imprégné d’influence espagnole ; et, par un juste retour, il réagit sur celui de l’Espagne. Ces échanges intellectuels traduisent assez bien la fraternité dont M. Maura vient de donner la formule mystique. L’Institut français, en s’efforçant de rapprocher l’élite intellectuelle des deux pays, se conforme à la tradition même de leur histoire. Il remet en vigueur des études qui ont été trop négligées en ces derniers temps. Il y travaille avec l’ardeur de la jeunesse et la certitude d’explorer un champ nouveau et fécond. L’impression qu’en emporte le visiteur est celle d’une œuvre venue à son heure et dont nous devons, par tous les moyens, assurer le développement.


RENÉ DOUMIC.