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jurées à Washington par le Japon et les États-Unis résisteraient-elles à l’épreuve des complications graves qui paraissent à la veille de se produire en Chine ? Tels sont aujourd’hui les ressorts de la politique.

C’est aussi la question du pétrole qui donne toute sa portée à l’incident soulevé à Gênes, le lundi 1er mai, par M. Jaspar, ministre des Affaires étrangères de Belgique, et qui a, du jour au lendemain, modifié la physionomie de la Conférence et changé peut-être le cours de ses destinées. La commission des Affaires russes discutait le texte du mémorandum qui devait être soumis à l’acceptation ou au refus du Gouvernement des Soviets. Les termes en devaient être soigneusement pesés et les garanties précisées, car, si les délégués bolchévistes le déclaraient inacceptable pour eux, il fallait prévoir le cas où un autre gouvernement russe prétendrait se prévaloir des concessions accordées, dans l’intérêt de la pacification générale, aux Bolchévistes. L’esprit de conciliation et de mutuelles concessions qui s’établit dans toute réunion internationale comme celle de Gènes et qui aide à trouver des solutions transactionnelles, avait porté les délégués français, et, croyaient-ils, leurs collègues belges, à accepter un texte qui, tout en stipulant que les anciens propriétaires rentreraient dans leurs biens ou recevraient une indemnité, laissait aux Bolchévistes la possibilité de spolier les anciens propriétaires pour accorder, avec leurs biens, des concessions à de nouveaux bénéficiaires. M. Jaspar, qui avait reçu de M. Theunis, président du conseil, rentré à Bruxelles, de nouvelles instructions fondées sur des informations récentes et circonstanciées, soutint un amendement spécifiant que les biens devaient être restitués dans tous les cas en nature à leurs propriétaires, « à moins d’impossibilité matérielle. » M. Barthou, qui avait accepté déjà le texte proposé, se contenta de réserver la décision du Gouvernement français, mais sans que cette réserve dût suspendre l’envoi, prévu pour le soir même, du mémorandum à la délégation bolchéviste. Tandis que, le lendemain, M. Barthou parlait pour Paris, à Gênes, la ferme résistance de M. Jaspar qui cependant avait, au cours de la Conférence, donné à M. Lloyd George des marques de sa bonne volonté empressée, révélait l’importance que le cabinet de Bruxelles attachait à son point de vue.

Les Belges ont, en Russie, de très importantes entreprises industrielles ; des renseignements précis leur donnaient à croire que certaines d’entre elles avaient été ou allaient être concédées à des exploitants d’une autre nationalité ; la perspective d’une indemnité