Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1922 - tome 9.djvu/948

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

autrefois, fit son entrée à Paris l’année même où Voltaire y venait mourir.

Qu’est-ce donc que le « merveilleux ? » La difficulté commence, dès qu’il faut le définir. Si l’esprit d’un trépassé vient converser, à l’appel de son nom, avec des vivants, et parle par l’intermédiaire des mouvements d’un guéridon suivant un alphabet convenu, tout le monde est d’accord pour dire que ce sera là quelque chose de merveilleux. Mais si un guéridon se soulève sans l’intervention d’aucune force physique connue, cela sera-t-D aussi quelque chose de merveilleux ? Oui assurément. Mais qu’un canon puisse tirer à une distance de 130 kilomètres, cela est-il ou n’est-il pas merveilleux ? Oui, dans l’acception que la conversation courante donne à ce mot, oui, c’est merveilleux, c’est-à-dire admirable, étonnant, non dans le sens qu’y attachent les spirites ; dans ce sens, merveilleux veut dire : ce qui est en dehors des lois du monde physique. C’est avec cette signification que j’emploierai ce mot au cours de cette brève étude. Le « merveilleux » ainsi entendu sera un peu la qualité des choses que Grasset appelait occultes.

Mais je n’aime pas beaucoup, je l’avoue, la définition que Grasset donnait de ces choses. L’occultisme, disait-il, n’est pas l’étude de tout ce qui est caché à la science, c’est l’étude des faits qui, n’appartenant pas encore à la science positive, peuvent lui appartenir un jour.

Cette définition est mauvaise. J’ai raconté ici même naguère qu’on a comblé récemment la lacune qui existait entre les rayons X les plus longs et les rayons ultra-violets les plus courts. Les radiations nouvelles trouvées par les physiciens Holweck et Millikan étaient donc des faits occultes, il y a deux ans, si l’on en croit Grasset. Aucun homme de science ne l’admettra. C’est que ces rayons n’étaient pas encore connus, étaient encore cachés, mais que l’induction, l’extrapolation des faits déjà observés permettait d’en supposer l’existence, et que celle-ci, avant même qu’elle ne fût prouvée, ne semblait en contradiction avec aucune des conquêtes antérieures de la science positive.

Il y a une autre raison qui rend difficile à admettre la définition de Grasset. C’est qu’occulte veut dire caché, et que l’explication des faits scientifiques, sinon leur existence, est encore pour la plupart très cachée. En un mot, et étymologiquement parlant, il n’y a que de l’occulte ici-bas.

La distinction que nous venons de faire entre l’existence des faits et leur explication nous fait toucher du doigt autre chose. Le « merveilleux » d’un guéridon qui se soulève, — ceci est une hypothèse, —