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Mon esprit, qui devant se trainoit bassement,
Prétend voler au ciel si tu le favorise.
Donc, ô divin Ronsard, ayde à mon entreprise :
Je sçay bien que sans toy j’oserois vainement.

Ainsy que Phaeton, d’une audace nouvelle,
Puisque, ô mon Apollon, ta fille je m’appelle,
Je te demande un don gage de ton amour.

Monstre moy le chemin et la sente inconnue
Par qui tant de lumière en la France est venue,
Et qui rend ton renom plus luysant que le jour.


Mme de Villeroy qui, avec la maréchale de Retz, assista le 24 février 1586 au Requiem chanté dans la chapelle du collège de Boncourt en mémoire de Ronsard, dut certainement composer quelque épitaphe ou chant funèbre à l’occasion de la mort du glorieux poète. Mais ni le Tombeau de ce dernier, — auquel collabora une autre femme de lettres, Jeanne de Faulquier, baronne de Seignelay, — ni les manuscrits de la Bibliothèque nationale n’en contiennent la moindre trace.

Le titre de « fille » de Ronsard, ce titre qui fait penser à Mlle de Gournay et à Montaigne, était suffisant pour illustrer Callianthe : Madeleine de L’Aubespine y joint le charme d’avoir été Rosette, l’inspiratrice des plus jolis vers d’amour de Desportes.


II

Lorsque ce dernier, exactement du même âge que Mme de Villeroy, publia ses premières œuvres au cours de l’été 1573, il venait d’avoir vingt-sept ans. Son nom était déjà célèbre. Rimeur infatigable, courtisan à toute épreuve, il avait su se faire remarquer au Louvre en dédiant à Charles IX une imitation de l’Arioste, en chantant les amours du duc d’Anjou, le futur Henri III, et en glorifiant, sous le nom d’Hippolyte, la plus jeune fille de Catherine de Médicis, Marguerite de Navarre,


Perle unique du monde et sa fleur la plus belle[1]

  1. Dans un important travail sur Desportes, M. Lavaud, bibliothécaire à la Bibliothèque nationale, justifiera tout au long cette identification, — qu’il me suffit de signaler ici, — de l’Hippolyte de Desportes avec la « reine Margot. »